Lois 184
Loi n° 98-027 du 20 janvier 1999
portant réorganisation du Conseil de Discipline
Financière et Budgétaire
(J.O. n° 2557 E.S. du 27.01.99, p.
428)
L’Assemblée Nationale a adopté en sa séance du 18 décembre
1998,
Le Président
de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
CHAPITRE PREMIER
Dispositions
générales
Article
premier - Il est institué auprès du Chef de Gouvernement un Conseil de
Discipline Financière et Budgétaire chargé d’examiner les fautes de gestion des
administrateurs énumérées aux articles 3 et 5, de prononcer les sanctions
prévues à l’article 2 ci-après.
Le Conseil de
Discipline Financière et Budgétaire n’a toutefois pas juridiction sur les
Présidents d’institutions et les Membres du Gouvernement. Il en est de même des
comptables publics lorsqu’ils ne sont pas gestionnaires de crédit.
Art. 2 -
Les fonctionnaires, magistrats, militaires ou agents civils de l’Etat et de ses
démembrements, les élus et les agents des collectivités territoriales
décentralisées, les responsables et agents des organismes soumis aux règles de
la comptabilité publique ou bénéficiant du concours des finances publiques ou
finances privées destinées à des fins d’intérêt public qui, chargés de
l’exécution des recettes et des dépenses de l’organisme concerné, commettant
l’une des fautes de gestion énumérées dans la présente loi sont passibles du
paiement d’une amende de 500.000 FMG. Cette
fourchette pourra être modifiée en tant
que de besoin par la loi de Finances annuelle.
Il en est de
même des agents désignés ci-dessus qui ont enfreint les règles relatives à
l’exécution de recettes fiscales, parafiscales et douanières ainsi que des
recettes des collectivités et organismes susvisés.
Art. 3 -
L’amende prononcée par le Conseil de Discipline Financière et Budgétaire ne
peut pas faire obstacle à la mise en
cause de la responsabilité pécuniaire des agents concernés par voie d’arrêté de
mise en débet du Ministre chargé du Budget ou par une action civile jointe à
l’action pénale, ni à l’exercice de l’action disciplinaire de droit commun, ni
à l’exercice de l’action pénale.
Art. 4 -
L’action devant le conseil de Discipline Financière et Budgétaire ainsi que
celles énumérées de l’article 3 ci-dessus est exercée sur la base du ou des
rapports établis par l’autorité hiérarchique, par corps ou services
d’inspections spéciales de l’organisme concerné, par l’inspection Générale de
l’Etat, tout autre organisme public ou privé spécialement habilité à cet effet.
Le Contrôle
des Dépenses Engagées est tenu d’informer le membre du Gouvernement intéressé
de toutes infractions prévues dans la présente loi qu’il viendrait à
connaître dans l’exercice de ses
fonctions.
Art. 5 -
Les rapports susvisés comportent obligatoirement une description précise des faits
incriminés, rémunération des points de la législation, de la réglementation ou
des principes de l’orthodoxie financière inappliqués, violés ou détournés,
l’évaluation des préjudices financiers causés ou des conséquences graves
entraînées par les fautes commises ou les négligences constatées ainsi que les
explications dûment signées de l’agent concerné et éventuellement de son chef
hiérarchique direct.
CHAPITRE II
Des infractions
Art. 6 -
Tombe sous le coup des sanctions prévues à l’article 2 le fait pour toute
personne désignée ci-dessus d’avoir engagé une dépense :
Sans avoir obtenu lorsqu’il est
requis, le titre d’engagement financier ou le visa préalable du contrôle des
dépenses engagées ;
Sans qualité pour le faire ou sans
avoir reçu délégation à cet effet, de la part des responsables ;
Avant que les crédits
correspondants n’aient été régulièrement mis à sa disposition,
En violation de la spécialité des
crédits alloués ;
En dépassements des crédits à
caractère limitatif ;
En violation du rythme de
consommation de crédits prévus par la circulaire d’exécution budgétaire émanant
du Ministère chargé du Budget et en l’absence d’autorisation de ce dernier ou
de l’organe habilité à cet effet ;
Après la clôture des opérations
d’engagement prévue par la circulaire d’exécution budgétaire.
Art.
7 - Expose à la même sanction le fait pour toute personne désignée
ci-dessus d’avoir :
Omis d’appliquer les prescriptions
de la réglementation des marchés publics lorsque celles-ci doivent être
appliquées à la dépense concernée.
Omis d’organiser la concurrence et
de procéder à une publicité régulière tant dans sa forme que dans sa durée dans
tous les cas où la concurrence et la publicité sont réglementairement requises.
Organisé l’exécution de la
commande ou la passation de contrats administratifs de conventions ou de
marchés de manière à s'attribuer directement ou par personne ou société
interposée, un partie ou la totalité des prestations ou des travaux à
effectuer.
Organisé l’exécution de la
commande ou la passation de contrats administratifs de conventions ou de
marchés de manière à favoriser un clientélisme injustifié ou à des conditions
manifestement défavorables aux intérêts
de l’administration ;
Passé commande de fournitures,
ordonné l’exécution de prestations ou des travaux avant la conclusion de
contrats administratifs, de conventions ou de marchés réglementaires, sauf sur
ordre de l’autorité contractante dans les conditions fixées par la
réglementation.
Conclu des marchés ou conventions
à des prix abusifs ;
Commandé des fournitures
manifestement ostentatoires ou fait exécuter des prestations ou travaux dont la
nature n’a aucun rapport avec la
vocation du Service ou de l’organisme concerné ou avec les résultats attendus
de celui-ci.
Art. 8 -
Est également passible de la même sanction le fait pour tout fonctionnaire,
magistrat, militaire ou agent public désigné à l’article 2 d’avoir :
enfreint les règles à l’exécution
des recettes de l’Etat et de ses démembrements, des collectivités territoriales
décentralisées et des organismes prévus au même article ;
soustrait des recettes et des
dépenses au principe de l’universalité budgétaire en percevant des droits ou
taxes non autorisés légalement ou non assis réglementairement, que le produit de
ceux-ci soit utilisé directement au profit de l’organisme concerné ou à
d’autres fins ;
émis en qualité d’ordonnateur ou
de sous- ordonnateur une ou des réquisitions de paiement abusives à l’encontre
d’un comptable public ou omis de procéder à la régularisation de paiements
avant ordonnancement préalable effectués à leur initiative ;
néglige ou omis de procéder à la
prise de mesures conservatoires nécessaires à la sauvegarde des intérêts
financiers de l’Administration ou de l’organisme dont il a la charge ;
procédé à une fausse certification
de service fait ou de situation de crédits, à une fausse attestation de prise
en charge en comptabilité administrative ou en comptabilité matière, à une
fausse attestation de réception des travaux.
négligé ou omis de procéder ou de
faire procéder à temps aux formalités et procédures de démarrage d’un ou
plusieurs projets inscrits dont le programme d’investissement public
compromettant ainsi le rythme de réalisation ou entraînant une hausse
considérable de ceux-ci par rapport aux prévisions initiales ;
négligé ou omis de fournir dans
les délais prescrits par la réglementation, les documents relatifs aux suivis
financiers et physiques d’exécution des dépenses de fonctionnement ou
d’investissements ;
négligé ou omis de fournir dans
les délais prescrits par la réglementation, la reddition annuelle des comptes
matières ;
négligé ou omis de fournir dans
les délais prescrits par les lois et règlements destinés à l’information des
organes délibérants, de la Cour des
Comptes et du Parlement pour chaque exercice écoulé.
Art. 9 -
Les sanctions prononcées en vertu de la présente loi ne peuvent se cumuler pour
une même affaire que dans la limite maximum prévue à l’article 2.
CHAPITRE III
De la composition du Conseil
Art. 10 -
Le Conseil de Discipline Financière et Budgétaire est composé comme suit :
Président :
un magistrat de l’ordre administratif ;
Membres
permanents :
Un inspecteur d’Etat ;
Un inspecteur du Trésor ;
Un inspecteur des Impôts ;
Un inspecteur des Douanes ;
Un ingénieur des Travaux
publics ;
Un rapporteur en la personne de
directeur administratif du Conseil.
Membres
occasionnels :
Le Directeur Général de
l’Inspection générale de l’Etat ou son représentant ;
Le Directeur Général du contrôle
des dépenses engagées ou son représentant ;
Le Directeur Général du Trésor ou
son représentant ;
Un représentant du ministère dont
relève l’agent traduit devant le Conseil ;
Un greffier
désigné par le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, assure les fonctions de
secrétaire de séance.
Art. 11 -
Le président et les membres permanents du Conseil sont désignés par décret pris
en conseil des Ministres sur proposition du Chef du Gouvernement en
consultation avec les Ministre dont relèvent les membres susnommés. Le président
et les membres permanents ont respectivement rang de Secrétaire et de
directeurs de ministère.
Art.
12 - Une Direction
administrative dont les attributions et l’organisation sont fixées par décret
est créée auprès du Conseil.
CHAPITRE IV
De la saisine du
Conseil
Art. 13 -
Ont qualité pour saisir le Conseil :
dans tous les cas :
Le Président de la
République ;
Le Chef du Gouvernement ;
Le(s) membre(s) du Gouvernement
chargé(s) des Finances et du Budget ou à défaut le Directeur Général du Trésor ;
Le Directeur Général de
l’Inspection générale de l’Etat ;
Le Directeur Général du Contrôle
des Dépenses engagées.
- pour les
faits relevés à la charge des fonctionnaires, magistrats, militaires et agents
placés sous leurs autorités, les Présidents d’institutions, les membres du
Gouvernement, les Présidents du Bureau Exécutif des collectivités territoriales
décentralisées ou représentants de
l’Etat auprès des dites collectivités, les Directeurs et Présidents du Conseil
d’Administration ou organismes soumis à la réglementation de la Comptabilité
publique.
Art. 14 -
Le délai de saisine du Conseil est fixé à quatre ans à compter du jour de la
découverte du ou des faits susceptibles d’être sanctionnés
CHAPITRE V
De la procédure et
de l’instruction
Art. 15 -
Le Conseil de discipline Financière et Budgétaire est saisi par lettre
adressée à son Président accompagnée de trois exemplaires au moins du ou des
rapports prévus à l’article 4.
Dès qu’il est saisi,
le Président du Conseil transmet immédiatement le dossier au rapporteur. Dans
un délai de deux mois, il peut procéder ou faire procéder à d’éventuels
compléments d’enquêtes ou d’investigations auprès des départements et
organismes concernés, convoquer et entendre l’agent en cause et tous autres
témoins dont l’audition est nécessaire et faire communiquer tous documents. Le
secret professionnel ne peut être opposé au Rapporteur.
Toutes les
convocations et autres notifications sont effectuées par le Greffier.
Art. 16 -
Dès l’ouverture de l’instruction, l’agent mis en cause est avisé officiellement
de la procédure dirigée contre lui. Il peut choisir d’assurer sa propre défense
ou de se faire assister par un avocat ou un défendeur de son choix.
Art. 17 -
Lorsqu’il estime l’instruction close et le dossier en état, le Rapporteur en
dresse un résumé sous forme de mémoire décrivant les faits incriminés,
rappelant les points ou principes de la législation ou de réglementation
inappliqués, violés ou détournés ainsi que l’évaluation des préjudices
financiers et autres causés à l’Etat ou à l’organisme concerné.
Art.
18 - Le Rapporteur
adresse ce mémoire assorti de ses propositions de sanctions aux Présidents et
aux Membres du Conseil, ainsi qu’aux autorités dont relève l’agent mis en
cause.
Faute
d’observation de la part des autorités dont relève l’agent mis en cause dans un
délai de 15 jours, le dossier est examiné par le Conseil.
Art. 19 -
Le Conseil se réunit sur convocation de son Président qui arrête le rôle
d’audience.
Les membres du
Conseil ont chacun quatre jours pour garder par dévers eux et examiner les
documents de l’instruction et les retourner au greffe. Un exemplaire de ces
documents est toutefois gardé en permanence au greffe.
Art. 20 -
L’agent mis en cause est invité à connaître devant le Conseil de Discipline
Financière et Budgétaire un mois au moins avant la réunion de celui-ci. Durant ce délai, il a le
droit de prendre connaissance des conclusions du Rapporteur au greffe, par
lui-même ou par défendeur interposé. Il a la faculté d’adresser au Président du
Conseil un mémoire écrit pour sa défense.
Art. 21 -
A la réunion du conseil au cours de laquelle le Rapporteur présente son
réquisitoire, l’agent mis en cause, soit par lui-même, soit par mandataire,
fait connaître ses observations. Des questions peuvent être posées par le
Président ou avec son autorisation par les membres du Conseil à l’intéressé qui
doit avoir la parole le dernier.
La non
comparution de l’intéressé dûment convoqué ou de son défenseur ne met pas
l’obstacle à la délibération du Conseil.
Art.
22 - Le Conseil délibère avec la participation de cinq membres au
moins dont le Président. Les séances du Conseil ne sont pas publiques. Les
décisions sont prises à la majorité des voix et rendues sous forme d’arrêtés
notifiés à l’intéressé , au Ministre chargé du budget (Service de la Solde ou des Pensions), à
l’autorité qui a saisi le conseil et au supérieur hiérarchique direct de
l’agent.
Art. 23 -
Les décisions du Conseil de Discipline Financière et Budgétaire sont
exécutoires d’office. Elles ne sont pas soumises à appel mais sont susceptibles
d’un recours en annulation non suspensif devant la juridiction administrative.
Un recours en
révision pourra être introduit devant le conseil en cas de découverte de
documents ou des faits inconnus au moment de l’instruction et de nature à
remettre en cause de la décision du conseil.
Art. 24 -
Le Service ou Organisme chargé de l’émission ou de la liquidation de la solde
ou de la pension de l’intéressé opère d’office un précompte mensuel sur les
salaires ou la pension de l’intéressé sans que chaque prélèvement puisse
dépasser la quotité cessible admise par la législation de droit commun en
matière de salaires.
Toutefois, en
cas de décès, de licenciement ou de révocation avec déchéance de droits à
pension avant apurement des sanctions pécuniaires infligées, le Directeur
Général du Trésor avisé par le responsable du Service de la Solde ou des
Pensions, et en collaboration avec le Directeur de la Législation et
contentieux, prend les mesures conservatoires nécessaires à la sauvegarde des
intérêts financiers de l’Administration.
Les mêmes
obligations incombent aux autorités des collectivités et organismes dotés de
budgets autonomes.
Art. 25 -
Le manquement aux obligations prévues à l’article précédent est passible des
peines prévues à l’article 2.
CHAPITRE VI
Dispositions
diverses
Art. 26 -
Les dépenses courantes et d’investissements ainsi que les dépenses de personnel
nécessaire au fonctionnement du Conseil de Discipline Financière et Budgétaire
sont imputées au Budget Général et au Programme d’investissements publics où le
Conseil figure en tant qu’entité distinct parmi les services et organismes
relevant du chef du Gouvernement.
Art. 27 -
Les dépenses nécessitées par la convocation et l’audition des prévenus et des
témoins sont imputées à la section des autres dépenses affectées pour les
agents de l’Etat et de ses démembrements et sur propres budgets pour les
collectivités et organismes dotés de l’autonomie financière.
Art. 28 -
Le Président, les membres permanents et occasionnels ainsi que le Greffier du
Conseil perçoivent une indemnité journalière de session dont les modalités de
paiement sont fixéés par décret.
Art. 29 -
La présente loi abroge et remplace les dispositions de la loi n° 90-023 du 13
novembre 1990.
Des décrets
préciseront en tant que besoin, les modalités d’exécution de la présente loi.
Art. 30 -
La présente loi sera publiée au Journal officiel de la République.
Elle sera
exécutée comme loi de l’Etat.
Promulguée
à Antananarivo, le 20 janvier 1999
Didier RATSIRAKA