Lois 293
LOI N0 56-353 DU 27 MARS 1956
portant amnistie dans
certains territoires d'Outre-mer (J.O. n° 3734 du 21.4.56, p. 1007)
TITRE PREMIER
AMNISTIE A LA SUITE
D'EVENEMENTS ET D'INCIDENTS A CARACTERE POLITIQUE
Article
premier -
Sont amnistiés les faits commis au cours ou à l'occasion des événements
énumérés ci-après lorsque ces faits n'ont entraîné initialement ou ne sont
susceptibles d'entraîner qu'une condamnation à l'amende ou à une peine
privative de liberté, assortie ou non d'une amende, dont la durée est
inférieure ou égale à quinze ans.
Toutefois, cette amnistie
est étendue aux condamnations initiales à une peine privative de liberté,
assortie ou non d'une amende, dont la durée est supérieure à quinze ans et
égale ou inférieure à vingt ans,
prononcées à l'encontre des grands invalides de guerre, des déportés des camps
de concentration ayant effectivement servi dans la Résistance française, des
anciens combattants cités et décorés des guerres l914-l9l8 et 1939-1945.
IV - MADAGASCAR
a. Manifestation du 19 mai 1946 à Tananarive ;
b. Incidents de Sabotsy-Namehana (Tananarive)
du 24 juin 1946;
c. Incidents d'Androrangavola (district
d'Ifanadiana) de décembre 1946
d. Incidents d'ordre divers à
l'occasion des élections de 1945 à 1947 en vue de signer des représentants de
la population autochtone aux deux Assemblées nationales constituantes, à
l'Assemblée Nationale (première Iégislative), au Conseil de la République et aux
Assemblées locales ;
e. Evénements dits «Rébellion malgache de 1947-1948».
Art. 2 - Sont également amnistiés
les faits commis dans les territoires visés à l'article premier, à l’occasion
de conflits du travail et de campagnes électorales, antérieurement au 1er janvier I954.
Art. 3 - Sont exclus du bénéfice
des dispositions des articles premier et 2 ceux qui auront fait l'objet d'une
condamnation à une peine privative de liberté ou supérieure à deux ans sans
sursis pour crime ou délit relatif à des affaires autres que celles énumérées à
l'article premier ou à des faits autres que ceux visés à l'article 2.
Art. 4 - Sont également exclus du
bénéfice des dispositions des articles premier et 2 ceux qui, au cours ou à
l'occasion des événements énumérés à l'article premier ou des faits visés à
l'article 2, se seront rendus coupables, comme auteurs, co-auteurs ou
complices, du crime de meurtre ou d'assassinat.
TITRE Il
LIBERATION ANTICIPEE DE
CERTAINS DETENUS
Art 5 - Les condamnés pour des
faits commis au cours ou à l'occasion des événements énumères à l'article
premier ou pour les faits visés à l'article 2 pourront bénéficier d'une
libération anticipée qui sera accordée dans les mêmes formes que la libération
conditionnelle prévue par la loi du 14 août 1885, quelle que soit la durée de
la peine restant à courir.
La libération anticipée
emporte les effets de la libération conditionnelle.
TITRE III
AMNISTIE AUX FONCTIONNAIRES,
EMPLOYES
OU AGENTS DES ADMINISTRATIONS
CIVILES
ET MILITAIRES
Art. 6
- Sont amnistiés les faits ayant donné lieu ou pouvant donner lieu, uniquement
ou conjointement à une sanction pénale amnistiée, à des sanctions
disciplinaires rendues à la suite des événements énumérés à l'article premier.
Les bénéficiaires des
dispositions du présent article pourront être rétabli: dans la situation qu'ils
avaient au jour où la sanction a produit effet, sans qu'ils puissent toutefois
prétendre à reconstitution de carrière ni à indemnité.
Art 7
- Sont amnistiés les faits ayant donné lieu à des sanctions disciplinaires
prononcées pour «inaptitude morale» contre les fonctionnaires, agents, ouvrier:
et employés de l'administration civile, en vertu de l'arrêté du Haut
Commissaire de la République à Madagascar en date du 18 juin 1947.
Les bénéficiaires des
dispositions du présent article seront rétabIis dans
la situation qu'ils avaient au jour où la sanction a produit effet, sans qu'ils
puissent toutefois prétendre à- reconstitution de carrière ni à indemnité.
Art 8
- Tout militaire des armées de terre, de mer et de l'air qui aura perdu son
grade, ses décorations ou ses droits à
pension en vertu des condamnations prononcées pour de: faits amnistiés par la
présente loi pourra, par décret, être réintégré dans lesdits grade et
décorations.
TITRE IV
AMNISTIE DE CERTAINES
INFRACTIONS
Art. 9 - Amnistie pleine et entière est accordée aux
infractions commises dans
les
territoires d'Outre-mer antérieurement au 1er janvier 1954 et qui
sont prévues par les textes suivants :
Articles 27, 30, 31, 33
premier aIinéa, de la loi du 29juillet 1881 sur la
liberté de la presse, modifiée par les ordonnances des 6 mai et 2 août 1944 et
13 septembre 1945 ;
Décret du 4 décembre 1930
modifiant pour Madagascar l'article 61 du Code pénal ;
Décret du 4 décembre 1930
modifiant pour Madagascar l'article 91 du Code pénal ;
Décret n° 47-1730 du 2
septembre 1947.
TITRE V
AMNISTIE PAR MESURE
INDIVIDUELLE
Art. 10 - Peuvent être admis par
décret au bénéfice de l'amnistie les condamnés pour des faits commis au cours
ou à l'occasion des événements énumérés à l'article premier à condition qu'ils
n'aient été frappés que d'une peine privative de liberté, assortie ou non d'une
amende, d'une durée inférieure à vingt ans.
Les intéressés auront un
délai d'un an, à compter de la publication de la présente loi ou de la date à
laquelle la condamnation sera devenue définitive, pour demander le bénéfice de
l'amnistie.
Il sera statué sur les
dossiers, après avis d'une commission dont la composition sera déterminée par
un arrêté conjoint du Ministre de la France d'Outre-mer et du Ministre de la
Justice.
TITRE VI
DISPOSITIONS D'ORDRE GENERAL
Art.11 - L'amnistie de
l'infraction entraîne, sans qu'elle puisse jamais donner lieu à, restitution,
la remise de toutes les peines principales, accessoires et complémentaires,
notamment de la rélégation. Elle rétablit l'auteur de
l'infraction amnistiée dans le bénéfice du sursis qui a pu lui être accordée
lors de la condamnation antérieure.
Art. 12 - L'amnistie ne peut en aucun
cas mettre obstacle à l'action en révision devant toute juridiction compétente
en vue de faire établir l'innocence du condamné.
Art. 13 - L'amnistie ne confère pas
la réintégration dans l'Ordre de la Légion
d’honneur, ni dans le droit au port de la médaille militaire. Il sera
statué à cet égard et pour chaque cas individuellement par la grande
chancellerie, sur la proposition du Ministre de la France d’Outre-mer et après
avis du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice ou s'il y a lieu du Ministre
de la Défense nationale.
Art. 14 - L'amnistie
ne préjudicie pas aux droits des tiers. En cas d'instance sur les
intérêts civils, le dossier pénal sera versé aux débats et mis à la disposition
des parties.
Lorsque le tribunal de répression aura été saisi avant la promulgation de la présente
loi, soit par citation, soit par
ordonnance de renvoi, ce tribunal restera compétent pour statuer, le cas échéant sur les intérêts civils.
Art. 15 - L'amnistie n'est pas
applicable aux frais de poursuite et d'instance avancés par l’Etat ou le Territoire. La contrainte par corps ne pourra être exercée contre les
condamnés ayant bénéficié de l'amnistie,
si ce n’est à la requête des victimes de l’infraction ou de leurs
ayants droit.
Art. 16 - Les contestations sur le
bénéfice de la présente amnistie sont soumises aux règles de compétence et de procédure prévues par les articles 590
et suivants du Code d’instruction criminelle
Lorsque le droit au bénéfice
de l'amnistie est réclamé par un inculpé, prévenu ou accusé, la requête doit
être présentée à la juridiction compétente pour statuer sur la poursuite. Dans
ce dernier cas, les débats sont soumis
aux mêmes règles de procédure et de
publicité que pour la poursuite elle-même.
Art. 17 - Il est interdit à tout
magistrat ou fonctionnaire de l'ordre administratif, et ce, peine de sanctions
disciplinaires pouvant aller jusqu'à la révocation ou la destitution, de
rappeler ou de laisser subsister, sous quelque forme que ce soit, dans un
dossier judiciaire ou de police, ou ,dans tout document quelconque les
condamnations, les peines disciplinaires et déchéances effacées par l'amnistie.
Seules, les minutes des
jugements ou arrêts déposées dans les greffes échappent à cette
interdiction.
Il est interdit, sous les
mêmes peines que ci-dessus, de rappeler ou de laisser subsister, sous quelque
forme que ce soit, dans tout dossier administratif ou tout autre document
quelconque concernant les fonctionnaires, agents, employés ou ouvriers des
services, publics ou concédés, les peines disciplinaires effacées par
l'amnistie.
La présente loi sera
exécutée comme loi de l'Etat.