Lois 89
LOI
N° 2004‑020 du 19 août 2004
sur le blanchiment, le dépistage, la confiscation et la
coopération
Internationale en matière de produits du
crime
(J.O. n° 2 939 du 08/11/04, p.
4203)
L'Assemblée Nationale et le
Sénat ont adopté en leur séance respective en date du 21 juin 2004 et du 08
juillet 2004,
Le Président de
Vu
Vu
promulgue
TITRE
PREMIER
GENERALITES
Article premier. -
Définition
.
Au sens de la présente loi
sont considérés comme blanchiment :
a) la
conversion ou le transfert de biens, dans le but de dissimuler ou de déguiser
l'origine illicite des biens ou d'aider toute personne qui est impliquée dans la
commission de l'infraction principale à échapper aux conséquences juridiques de
ses actes ;
b) la
dissimulation ou le déguisement de la nature, de l'origine, de l'emplacement, de
la disposition, du mouvement ou de la propriété réels de
biens ;
c)
l'acquisition, la détention ou l'utilisation de biens, par une personne qui sait
que lesdits biens constituent un produit du crime au
sens de la présente loi.
La connaissance, l'intention ou la motivation
nécessaires en tant qu'élément de l'infraction peuvent être déduites de circonstances
factuelles objectives.
Art. 2. -
Terminologie
Au sens de la présente
loi :
1) le terme « produit du crime » désigne tout
bien ou tout avantage économique tiré directement ou
indirectement d'un crime ou délit ;
Cet avantage peut constituer en un bien tel que
défini à l'alinéa 2 du présent article ;
2) Le terme « bien » désigne tous les types
d'avoirs, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles ou
intangibles, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété de ces
avoirs ou des droits y relatifs ;
3) Le terme « instrument » désigne tous les
objets employés ou destinés à être
employés de quelque façon que ce soit, en tout ou en partie, pour commettre une
ou des infractions pénales.
4) Le
terme « organisation criminelle » désigne, au sens de la présente loi, tout
groupe structuré dans le but de commettre des crimes ou
délits ;
5) Le
terme « confiscation » désigne la dépossession permanente de biens ou
de produits tirés d'une infraction ou de moyens utilisés pour la commettre sur
décision d'un tribunal ou d'une autre entité
compétente ;
6) Le
terme « infraction d'origine » désigne toute infraction pénale, même
commise à l'étranger, ayant permis à son auteur de se procurer des produits au
sens de la présente loi ;
7) Le
terme « auteur » désigne toute personne ayant participé à l'infraction
soit en qualité d'auteur principal, de co-auteur ou de
complice.
Afin de servir de base à des
poursuites pour blanchiment, les faits d'origine commis à l'étranger doivent
avoir le caractère d'une infraction pénale dans le pays où ils ont été commis et
dans la loi interne de Madagascar, sauf accord précis
contraire.
TITRE II
PREVENTION DU BLANCHIMENT
CHAPITRE I
DISPOSITIONS GENERALES DE
PREVENTION
Art. 3. - Professions soumises aux titres II et III de la
présente loi.
Les titres II et III de la présente loi s'appliquent
à toute personne physique ou morale qui, dans le cadre de sa profession,
réalise, contrôle, ou conseille des opérations entraînant des dépôts, des
échanges, des placements, des conversions ou tous autres mouvements de capitaux
et notamment aux établissements de crédit, aux institutions et intermédiaires
financiers.
Les titres II et III de la
présente loi s'appliquent également, pour toutes leurs opérations, aux changeurs
manuels, aux casinos et aux établissements de jeux, ainsi qu'à ceux qui
réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations
immobilières.
Les personnes qui, dans
l'exercice de leur profession, réalisent, contrôlent ou conseillent des
opérations entraînant des mouvements de capitaux, les établissements bancaires
et financiers publics et privés, les services de la poste, les sociétés
d'assurance, les mutuelles, les sociétés de bourse et les commerçants changeurs
manuels sont tenus d'avertir le service institué à l'article 16 dès lors qu'il
leur apparaît que des sommes, ou des opérations portant sur ces sommes, sont
susceptibles de provenir d'infractions prévues aux articles 95 à 97, 100 et 101
de la loi n° 97‑039 du 04 novembre 1997 sur le contrôle des stupéfiants,
des substances psychotropes et des précurseurs à Madagascar ou d'une criminalité
transnationale organisée.
Art. 4. -
Limite à l'emploi d'espèces et de
titres au porteur.
Tout paiement en espèces ou
par titres au porteur d'une somme globalement supérieur à 50 millions de Fmg ou 10 tapitrisa ariary est interdit.
Toutefois, un décret pris en
Conseil de Gouvernement peut déterminer les cas et les conditions auxquels une
dérogation à l'alinéa précédent sera admise. Dans ce cas, une déclaration
précisant les modalités de l'opération, ainsi que l'identité des parties, doit
être faite à l'unité de renseignements financiers instituée à l'article 16 de la
présente loi.
Art. 5. -
Obligation de réaliser les
transferts de fonds internationaux par un établissement de crédit ou une
Institution financière.
Tout transfert vers l'étranger ou en provenance de
l'étranger de fonds, titres ou valeurs pour une somme dont le montant cumulé est
supérieur à 30 millions de Fmg ou 6 tapitrisa ariary doit être
effectué par un établissement de crédit ou une institution financière habilitée,
ou par son intermédiaire.
Les chiffres indiqués à cet
alinéa et à l'alinéa 1er de l'article 4 peuvent être modifiés par
décret pris en Conseil de Gouvernement.
CHAPITRE II
TRANSPARENCE DANS LES OPERATIONS
FINANCIERES
Art. 6. - Dispositions générales.
L'Etat organise le cadre
juridique de manière à assurer la transparence des relations économiques,
notamment en assurant que le droit des sociétés et les mécanismes juridiques de
protection des biens ne permettent pas la constitution d'entités fictives ou de
façade.
Art. 7. - Identification des clients par les établissements de
crédit et les Institutions financières.
Les établissements de crédit et les institutions
financières sont tenus de s'assurer de l'identité et de l'adresse de leurs
clients avant d'ouvrir un compte ou des livrets, de prendre en garde des titres,
valeurs ou bons, d'attribuer un coffre ou d'établir toutes les autres relations
d'affaires.
La vérification de l'identité d'une personne physique
est opérée par la présentation d'un document officiel original en cours de
validité et comportant une photographie, dont il est pris une copie. La
vérification de son adresse est effectuée par la présentation d'un document de
nature à en faire la preuve.
L'identification d'une personne morale est effectuée
par la production des statuts et de tout document établissant qu'elle a été
légalement enregistrée et qu'elle a une existence réelle au moment de
l'identification. Il en est pris copie.
Les responsables, employés et mandataires appelés à
entrer en relation pour le compte d'autrui doivent produire, outre les pièces
prévues à l'alinéa 2 du présent article, les documents attestant de la
délégation de pouvoir qui leur est accordée, ainsi que des documents attestant
de l'identité et de l'adresse des ayants droit
économiques.
Art. 8. - Identification des clients
occasionnels.
L'identification des clients
occasionnels s'effectue selon les conditions prévues à l'article 7, pour toute
transaction portant sur une somme supérieure à 15 millions de Fmg ou 3 tapitrisa ariary.
Dans les cas où le montant
des transactions n'est pas connu au moment de l'opération, il est procédé à
l'identification du client dès que le montant est connu ou que le seuil prévu à
l'alinéa 1 est atteint.
L'identification est requise
même si le montant de l'opération est inférieur au seuil fixé lorsque la
provenance licite des capitaux n'est pas certaine.
L'identification doit aussi
avoir lieu en cas de répétition d'opérations distinctes, effectuées dans une
période limitée et pour un montant individuel inférieur à celui prévu par
l'alinéa 1.
Art. 9. - Identification de l'ayant droit
économique.
Au cas où il n'est pas
certain que le client agit, pour son propre compte, l'établissement de crédit ou
l'institution financière se renseigne par tous les moyens sur l'identité du
véritable donneur d'ordre et/ou de celui pour lequel il agit. Après
vérification, si le doute persiste sur l'identité du véritable ayant - droit, il
doit être mis fin à la relation bancaire, sans préjudice le cas échéant, de
l'obligation de déclarer les soupçons.
Si le client est un avocat,
un comptable public ou privé, une personne privée ayant une délégation
d'autorité publique, ou un mandataire intervenant en tant qu'intermédiaire
financier, il ne peut invoquer le secret professionnel pour refuser de
communiquer l'identité du véritable opérateur.
Art. 10.
- Surveillance particulière de
certaines opérations.
Lorsqu'une opération porte sur une somme supérieure à
250 millions de Fmg ou 50 tapitrisa ariary et est effectuée
dans des conditions de complexité inhabituelles ou injustifiées, ou paraît ne
pas avoir de justification économique ou d'objet licite, l'établissement de
crédit ou l'institution financière est tenu de se renseigner sur l'origine et la
destination des fonds ainsi que sur l'objet de l'opération et l'identité des
acteurs économiques de l'opération.
L'établissement de crédit ou l'institution financière
établit un rapport confidentiel écrit comportant tous renseignements utiles sur
ses modalités, ainsi que sur l'identité du donneur d'ordre et, le cas échéant,
des acteurs économiques de l'opération.
Le rapport est conservé dans
les conditions prévues à l'article 11.
Une vigilance particulière
doit être exercée à l'égard des opérations provenant d'établissements ou
institutions financières qui ne sont pas soumis à des obligations suffisantes en
matière d'identification des clients ou de contrôle des
transactions.
Art. 11.
- Conservation des documents par les
établissements de crédit et les
institutions financières.
Les établissements de crédit et les institutions
financières conservent et tiennent à la disposition des autorités énumérées à
l'article 12 :
1) les documents relatifs à l'identité des clients
pendant 5 ans au moins après la clôture des comptes ou la cessation des
relations avec le client ;
2) les
documents relatifs aux opérations effectuées par les clients et les
comptes‑rendus à l'article 10 pendant 5 ans au moins après l'exécution de
l'opération.
Art. 12. -
Communication des
documents.
Les renseignements et
documents visés aux articles 7 à 11 sont communiqués au service de
renseignements financiers institué à l'article 16 et dans le cadre de ses
attributions définies aux articles 16 à 22.
En aucun cas, les personnes
ayant l'obligation de transmettre les renseignements et les documents
susmentionnés, ainsi que toute autre personne en ayant connaissance, ne les
communiqueront à d'autres personnes physiques ou morales que celles énumérées à
l'alinéa 1, sauf si les autorités ci-dessus visées
l'autorisent.
Art. 13.
- Programmes internes de lutte
contre le blanchiment au sein des
établissements de crédit et des Institutions financières.
Les établissements de crédit
et les institutions financières élaborent des programmes de prévention du
blanchiment de l'argent. Ces programmes comprennent :
a) la
centralisation des informations sur l'identité des clients, donneurs d'ordre,
bénéficiaires et titulaires de procuration, mandataires, ayant-droit économiques, et sur les transactions
suspectes ;
b) la
désignation des responsables de la direction centrale, de chaque succursale, et
de chaque agence ou service local ;
c) la
formation continue des fonctionnaires ou employés ;
d) un
dispositif de contrôles internes de l'application et de l'efficacité des mesures
adoptées pour l'application de la présente loi.
Art. 14.
- Change
manuel.
Constitue une opération de
change manuel, au sens de la présente Loi, l'échange immédiat de billets ou
monnaies libellés en devises différentes et la livraison d'espèces contre le
règlement par un autre moyen de paiement libellé dans une autre devise
différente.
Les personnes physiques ou
morales qui font profession habituelle d'effectuer des opérations de change
manuel sont tenues :
a)
d'adresser, avant de commencer leur activité, une déclaration d'activité au
Ministère des Finances, après avis de
b) de
s'assurer de l'identité de leurs clients, par la présentation d'un document
officiel original en cours de validité et comportant une photographie, dont il
est pris copie, avant toute transaction
portant sur une somme supérieure à 15 millions de Fmg ou 3 tapitrisa ariary ou pour toute transaction effectuée dans des
conditions de complexité inhabituelles ou
injustifiées ;
c) de
consigner, dans l'ordre chronologique toutes opérations, leur nature et leur
montant avec indication des noms et prénoms du client, ainsi que du numéro du
document présenté, sur un registre côté et paraphé par l'autorité administrative
compétente et de conserver ledit registre pendant 5 ans au moins après la
dernière opération enregistrée.
Art. 15.
- Casinos et établissements de jeux.
Les casinos et établissements de jeux sont
tenus :
a)
d'adresser, avant de commencer leur activité, une déclaration d'activité au
Ministère des Finances, ou Ministère de l'Intérieur aux fins d'obtenir
l'autorisation d'ouverture et de fonctionnement prévue par la législation
nationale en vigueur, et de justifier, dans cette déclaration, de l'origine
licite des fonds nécessaires à la création de l'officine ou de
l'établissement ;
b) de
tenir une comptabilité régulière et de la conserver pendant 5 ans au moins. Les
principes comptables définis par la législation nationale sont applicables aux
casinos et cercles de jeux ;
c) de
s'assurer, de l'identité, par la présentation d'un document officiel original en
cours de validité et comportant une photographie, dont il est pris copie, des
joueurs qui achètent, apportent ou échangent des jetons ou des plaques pour une
somme supérieure à 15 millions de Fmg ou 3 tapitrisa ariary ;
d) de
consigner, dans l'ordre chronologique toutes les opérations visées au c) du
présent article, leur nature et leur montant avec indication des noms et prénoms
des joueurs, ainsi que du numéro du document présenté, sur un registre côté et
paraphé par l'autorité administrative compétente et de conserver ledit registre
pendant 5 ans au moins après la dernière opération
enregistrée ;
e) de
consigner, dans l'ordre chronologique, tous transferts de fonds effectués entre
ces casinos et cercles de jeux sur un registre côté et paraphé par l'autorité
administrative compétente et de conserver ledit registre pendant 5 ans au moins
après la dernière opération enregistrée.
Dans le cas où
l'établissement de jeux est tenu par une personne morale possédant plusieurs
filiales, les jetons doivent identifier la filiale par lesquels ils sont émis.
En aucun cas, des jetons émis par une filiale ne peuvent être remboursés dans
une autre filiale, y compris à l'étranger.
TITRE III
DETECTION DU BLANCHIMENT
CHAPITRE
PREMIER
COLLABORATION AVEC LES AUTORITES
CHARGEES
DE LUTTER CONTRE LE BLANCHIMENT
SECTION PREMIERE
Le service de
renseignements
financiers
Art. 16.
- Dispositions
générales.
Un service de renseignements financiers, organisé
dans les conditions fixées par un décret, est chargé de recevoir, d'analyser et
de traiter les déclarations auxquelles sont tenus les personnes et organismes
visés à l'article 3. I1 reçoit aussi toutes autres informations utiles,
notamment celles communiquées par les autorités judiciaires. Ses agents sont
tenus au secret des informations ainsi recueillies qui ne peuvent être utilisées
à d'autres fins que celles prévues par ce texte.
La composition et les
attributions du service, les conditions de nature à assurer ou à renforcer son
indépendance, ainsi que le contenu et les modalités de transmission des
déclarations qui lui sont adressées sont fixées par
décret.
Art. 17.
- Accès à
l'information.
Le service peut aussi, sur sa demande et en
application de l'article 27, obtenir de toute autorité publique et de toute
autre personne physique ou morale visée à l'article 3, la communication des
informations et documents conformément à l'article 12, dans le cadre des
investigations entreprises à la suite d'une déclaration de soupçon. Il peut
également échanger des
renseignements avec les autorités chargées de l'application des sanctions
disciplinaires prévues à l'article 33.
Il peut, sur demande et en application de l'article
27, avoir accès aux bases de données des autorités publiques. Dans tous les cas,
l'utilisation des informations ainsi obtenues est strictement limitée aux fins
poursuivies par la présente loi.
Art. 18. -
Relations avec les services de
renseignements financiers étrangers.
Le service de renseignements
financiers peut, sous réserve de réciprocité, échanger des informations avec les
services étrangers chargés de recevoir et de traiter les déclarations de
soupçons, lorsque ceux-ci sont soumis à des obligations de secret analogue et
quelle que soit la nature de ces services. A cet effet, il peut conclure des
accords de coopération avec ces services.
Lorsqu'il est saisi d'une
demande de renseignement ou de transmission par un service étranger homologue
traitant une déclaration de soupçon, il y donne suite dans le cadre des pouvoirs
qui lui sont conférés par la présente loi pour traiter de telles
déclarations.
SECTION 2
La déclaration
de soupçons
Art. 19.
- Obligation de déclarer les
opérations suspectes.
Toute personne physique ou
morale visée à l'article 3 est tenue de déclarer au service de renseignements financiers,
les opérations prévues à l'article 3 lorsqu'elle porte sur des fonds paraissant
provenir de l'accomplissement d'un crime ou délit.
Les personnes susvisées ont l'obligation de déclarer
les opérations réalisées même s'il a été impossible de surseoir à leur exécution
ou s'il n'est apparu que postérieurement à la réalisation de l'opération que
celle-ci portait sur des fonds suspects.
Elles sont également tenues
de déclarer sans délai toute information tendant à renforcer le soupçon ou à
l'infirmer.
Art. 20. -
Transmission au service de
renseignements financiers.
Les déclarations de soupçons
sont transmises au service de renseignements financiers par télécopie ou, à
défaut, par tout autre moyen écrit. Les déclarations faites téléphoniquement
doivent être confirmées par télécopie ou tout autre moyen écrit dans les délais
les plus brefs. Ces déclarations indiquent suivant le
cas :
1)
l'identité des opérateurs et la nature des
opérations ;
2) les
raisons pour lesquelles l'opération a déjà été
exécutée ;
3) le
délai dans lequel l'opération doit être exécutée.
Dès réception, le service
accuse réception de la déclaration.
Art. 21.
- Opposition à l'exécution des
opérations.
Si, en raison de la gravité ou de l'urgence de
l'affaire, le service l'estime nécessaire, il peut faire opposition à
l'exécution de l'opération avant l'expiration du délai d'exécution mentionné par
le déclarant. Cette opposition est notifiée à ce dernier, immédiatement, ou par
télécopie ou tout autre moyen écrit. L'opposition fait obstacle à l'exécution de
l'opération pendant une durée qui ne peut excéder 48
heures.
Le Président du tribunal de
première instance territorialement compétent, saisi par le service de
renseignements financiers, peut ordonner le blocage des fonds, comptes ou titres
pour une durée supplémentaire qui
ne peut excéder huit jours.
Art. 22. - Suites données
aux déclarations.
.
Dès qu'apparaissent dés indices sérieux de nature à
constituer l'infraction de blanchiment de l'argent, le service transmet un
rapport sur les faits, accompagné de son avis, au Procureur de
CHAPITRE II
EXEMPTION DE RESPONSABILITE
Art. 23.
- Exemption de responsabilité du
fait des déclarations de soupçons faites de bonne foi
Aucune poursuite pour violation du secret bancaire ou
professionnel ne peut être engagée contre les personnes ou les dirigeants et
préposés des organismes désignés à l'article 3 qui, de bonne foi, ont transmis
les informations ou effectué les déclarations prévues par les dispositions de la
présente loi.
Aucune action en responsabilité civile ou pénale ne
peut être intentée, ni aucune sanction professionnelle prononcée contre les
personnes ou les dirigeants et préposés des organismes désignées à l'article 3
qui, de bonne foi, ont transmis les informations ou effectué les déclarations
prévues par les dispositions de la présente loi, même si les enquêtes ou les
décisions judiciaires n'ont donné lieu à aucune
condamnation.
Aucune action en responsabilité civile ou pénale ne
peut être intentée contre les personnes ou les dirigeants et préposés des
organismes désignés à l'article 3 du fait des dommages matériels et/ou
immatériels qui pourraient résulter du blocage d'une opération dans le cadre des
dispositions de l'article 21.
La bonne foi est présumée et il appartient à la
victime du préjudice causé d'en rapporter la preuve contraire.
En cas de préjudice
résultant directement d'une déclaration de soupçon de bonne foi non
fondée , l'Etat répond du dommage subi aux conditions et dans les limites
prévues par la législation nationale.
Art. 24.
- Exemption de responsabilité du
fait de l'exécution des opérations.
Lorsqu'une opération
suspecte a été exécutée, et sauf cas de concertation frauduleuse avec le ou les
auteurs du blanchiment, aucune poursuite pénale du chef de blanchiment ne peut
être engagée contre l'une des personnes visées à l'article 3, leurs dirigeants
ou préposés, si la déclaration de soupçons a été faite dans les conditions
prévues par les articles 18 à 20.
Il en est de même lorsqu'une
personne soumise à la présente loi a effectué une opération à la demande des
services d'enquêtes agissant dans les conditions prévues à l'article
25.
CHAPITRE III
TECHNIQUES
D’INVESTIGATION
Art. 25.
- Techniques particulières
d'investigation.
Afin d'obtenir la preuve de
l'infraction d'origine et la preuve des infractions prévues à la présente loi,
les autorités judiciaires peuvent ordonner, pour une durée
déterminée :
a) le
placement sous surveillance des comptes bancaires et des comptes assimilés
aux comptes
bancaires ;
b)
l'accès à des systèmes, réseaux et serveurs
informatiques ;
c) le
placement sous surveillance ou sur écoute de lignes téléphoniques, de
télécopieurs ou de moyens électroniques de transmission ou de
communication ;
d)
l'enregistrement audio et vidéo des faits et gestes et des
conversations ;
e) la
communication d'actes authentiques et sous seing privé, de documents bancaires
financiers et commerciaux.
Elles peuvent également
ordonner la saisie des documents susmentionnés.
Cependant, ces opérations ne sont possibles que
lorsque des indices sérieux permettent de suspecter que ces comptes, lignes
téléphoniques, systèmes et réseaux informatiques ou documents sont utilisés ou
sont susceptibles d'être utilisés par des personnes soupçonnées de participer
aux infractions visées à l'alinéa 1 du présent article.
Art. 26.
- Opérations sous couverture et
livraisons surveillées.
Ne sont pas punissables, les
fonctionnaires compétents pour constater les infractions d'origine et de blanchiment qui, dans le
seul but d'obtenir des éléments de preuve relatifs aux infractions visées par la
présente loi et dans les conditions définies à l'alinéa suivant, commettent des
faits qui pourraient être interprétés comme les éléments d'une des infractions
visées aux articles 30, 31 et 34.
L'autorisation du Procureur de
CHAPITRE IV
SECRET BANCAIRE OU
PROFESSIONNEL
Art. 27.
- Interdiction d'invoquer le secret
bancaire.
Le secret bancaire ou professionnel ne peut être
invoqué pour refuser de fournir les informations prévues par l'article 12 ou
requises dans le cadre d'une enquête portant sur des faits de blanchiment
ordonnée par, ou effectuée sous le contrôle d'une autorité
judiciaire.
TITRE IV
DES MESURES COERCITIVES
CHAPITRE PREMIER
DE
Art. 28. -
De la saisie.
Les autorités judiciaires et les fonctionnaires
compétents chargés de la détection et de la répression des infractions liées au
blanchiment peuvent saisir les biens en relation avec l'infraction objet de
l'enquête, ainsi que tous éléments de nature à permettre de les identifier,
conformément aux règles de droit commun.
Art. 29.
- Des mesures
conservatoires.
L'autorité judiciaire
compétente pour prononcer les mesures conservatoires peut, d'office ou sur
requête du Ministère public ou d'une administration compétente, ordonner, aux
frais de l'Etat, de telles mesures, y compris le gel des capitaux et des
opérations financières sur des biens, quelle qu'en soit la nature, susceptibles
d'être saisis ou confisqués.
La mainlevée de ces mesures
peut être ordonnée à tout moment à la demande du Ministère public ou, après avis
de ce dernier, à la demande de l'administration compétente ou du
propriétaire.
CHAPITRE II
DE
SECTION I
Sanctions applicables
Art. 30.
- Blanchiment.
Seront punis des travaux forcés à temps et d'une
amende de 500.000 à 5.000.000 de Fmg ou 100.000 à
1.000.000 ariary sans que l'amende soit inférieure à
cinq fois le montant du corps du délit, ceux qui auront commis un fait de
blanchiment tel qu'il est défini à l'article 1.
Les peines seront remplacées
par celles des travaux forcés à perpétuité :
a)
lorsque l'infraction est perpétrée dans l'exercice d'une activité
professionnelle ;
b)
lorsque l'infraction est perpétrée dans le cadre d'une organisation
criminelle.
Art. 31.
- Association ou entente en vue du
blanchiment.
Sera punie des mêmes peines
prévues à l'article 30, la participation à une association ou entente en vue de
la commission des faits visés au même article.
Art. 32.
- Sanctions applicables aux
personnes morales ;
Les personnes morales autres que l'Etat, pour le
compte ou au bénéfice desquelles une infraction subséquente a été commise par
l'un de leurs organes ou représentants, seront punies d'une amende d'un taux
égal au quintuple des amendes spécifiées pour les personnes physiques, sans
préjudice de la condamnation de ces dernières comme auteurs ou complices de
l'infraction.
Les personnes morales
pourront en outre être condamnées :
a) à
l'interdiction à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus d'exercer
directement ou indirectement certaines activités
professionnelles ;
b) à la
fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus de leurs
établissements ayant servi à
commettre l'infraction ;
c) à la
dissolution lorsqu'elles ont été créées pour commettre les faits
incriminés ;
d) à la
diffusion de la décision par la presse écrite ou par tout autre moyen de communication
audiovisuelle.
Art. 33.
- Sanctions prononcées par les
autorités disciplinaires ou de contrôle.
Lorsque, par suite soit d'un grave défaut de
vigilance, soit d'une carence dans l'organisation des procédures internes de
prévention du blanchiment, un établissement de crédit, une institution
financière ou toute autre personne physique ou morale visée à l'article 3 aura
méconnu l'une des obligations qui lui sont assignées par la présente Loi;
l'autorité disciplinaire ou de contrôle peut agir d'office dans les conditions
prévues par les règlements professionnels et
administratifs.
Art. 34.
- Sanctions des autres
infractions.
1. Seront
punis d'un emprisonnement de 1 à 5 ans et d'une amende de 500.000 de Fmg ou 100.000 ariary à 5.000.000
de Fmg ou 1.000.000 ariary
ou de l'une de ces deux peines seulement :
a) les
personnes et les dirigeants ou préposés des organismes désignés à l'article 3
qui auront sciemment fait au propriétaire des sommes ou à l'auteur des
opérations visées audit article, des révélations sur la déclaration qu'ils sont
tenus de faire ou sur les suites qui lui ont été
réservées ;
b) ceux
qui auront sciemment détruit ou soustrait des registres ou documents dont la
conservation est prévue par les articles 10, 11, 14, et
15 ;
c) ceux qui auront réalisé ou tenté de réaliser sous une
fausse identité l'une des opérations visées aux articles 3 à 5, 7 à 10, 14 et
15 ;
d) ceux qui ayant eu connaissance en raison de leur
profession, d'une enquête pour des faits
de blanchiment, en auront sciemment informé par tous moyens la ou les
personnes visées par l'enquête ;
e) ceux
qui auront communiqué aux autorités judiciaires ou aux fonctionnaires compétents
pour constater les infractions d'origine et subséquentes des actes ou document
spécifiés à l'article 15 d) qu'ils savaient tronqués ou erronés, sans les en
informer;
f) ceux
qui auront communiqué des renseignements ou documents à d'autres personnes que
celles prévues à l'article 12 ;
g) ceux
qui n'auront pas procédé à la déclaration de soupçons prévue à l'article 19,
alors que les circonstances de l'opération amenaient à déduire que les fonds
pouvaient provenir d'une des infractions visées à cet
article.
2. Seront
punis d'une amende de 250.000 à 2.500.000 de Fmg ou
50.000 à 500.000 ariary :
a) ceux
qui auront omis de faire la déclaration de soupçon prévue à l'article
19 ;
b) ceux
qui auront effectué ou accepté des règlements en espèces pour des sommes supérieures au montant
autorisé par la réglementation ;
c) ceux
qui auront contrevenu aux dispositions de l'article 5 relatives aux transferts
internationaux de fonds ;
d) les
dirigeants et préposés des entreprises de change manuel, des casinos, des
cercles de jeux, des établissements de crédit et des institutions financières
qui auront contrevenu aux
dispositions des articles 7 à 15.
3. Les personnes qui se sont rendues
coupables de l'une ou de plusieurs infractions spécifiées aux alinéas 1 et 2
ci-dessus peuvent également être condamnées à l'interdiction définitive ou pour
une durée maximale de cinq ans, d'exercer la profession à l'occasion de laquelle
l'infraction a été commise.
Art. 35. - De l'infraction d'origine.
Les dispositions du titre IV
s'appliqueront quand bien même l'auteur de l'infraction d'origine ne serait ni
poursuivi ni condamné, ou quand bien même il manquerait
une condition pour agir en justice à la suite de ladite infraction. L'auteur de
délit d'origine pourra être également poursuivi pour l'infraction de
blanchiment.
SECTION II
De la
confiscation
Art. 36. –
Confiscation.
Dans le cas de condamnation
pour infraction de blanchiment ou de tentative, sera ordonnée la
confiscation :
1) des
biens objets de l'infraction, y compris les revenus et les autres avantages qui
en ont été tirés, à quelques personnes qu'ils appartiennent, à moins que leur
propriétaire n'établisse qu'il les a acquis en versant effectivement le juste
prix ou échange de prestations correspondant à leur valeur ou toute autre
activité licite, et qu'ils en ignoraient l'origine
illicite ;
2) des
biens appartenant, directement ou indirectement, à une personne condamnée pour
fait de blanchiment à son conjoint, son concubin et ses enfants, à moins que les
intéressés n'en établissent l'origine licite.
En outre, en cas
d'infraction constatée par le tribunal, lorsqu'une condamnation ne peut être
prononcée contre son ou ses auteurs, celui-ci peut néanmoins ordonner la confiscation des biens sur lesquels
l'infraction a porté.
Peut, en outre, être
prononcée la confiscation des biens en quelque lieu qu'ils se trouvent, entrés,
directement ou indirectement, dans le patrimoine du condamné, de son conjoint,
son concubin et de ses enfants, depuis la date du plus ancien des faits
justifiant sa condamnation, à moins que les intéressés n'en établissent
l'origine licite.
Lorsqu'il y a confusion des biens provenant
directement ou indirectement de l'infraction et d'un bien acquis légitimement,
la confiscation de ce bien n'est ordonnée qu'à concurrence de la valeur estimée
par la juridiction, des ressources et des biens susvisés.
La décision ordonnant une
confiscation désigne les biens concernés et les précisions nécessaires à leur
identification et localisation.
Lorsque les biens à
confisquer ne peuvent être représentés, la confiscation peut être ordonnée en
valeur.
Art. 37. -
Ordonnance de
confiscation.
Lorsque les faits ne peuvent donner lieu à poursuite,
le Ministère public peut demander à un juge que soit ordonnée la confiscation
des biens saisis.
Le juge saisi de la demande
peut rendre une ordonnance de confiscation :
1) si la
preuve est rapportée que lesdits biens constituent les
produits d'un crime ou d'un délit au sens de la présente
loi ;
2) si les
auteurs des faits ayant généré les produits ne peuvent être poursuivis soit
parce qu'ils sont inconnus, soit parce qu'il existe une impossibilité légale aux
poursuites du chef de ces faits, sauf cas de prescription.
Art. 38.
- Confiscation des biens d'une
organisation criminelle.
Doivent être confisqués les biens sur lesquels une
organisation criminelle exerce un pouvoir de disposition, lorsque ces biens ont
un lien avec l'infraction.
Art. 39. -
Nullité de certains
actes.
Est nul, tout acte passé à
titre onéreux ou gratuit entre vifs ou pour cause de mort qui a pour but de
soustraire des biens aux mesures de confiscation prévus aux articles 36 à
38.
En cas d'annulation d'un
contrat à titre onéreux, le prix n'est restitué à l'acquéreur que dans la mesure
où il a été effectivement versé.
Art. 40. -
Sort des biens
confisqués.
Les ressources ou les biens
confisqués sont dévolus à l'Etat qui peut les affecter à un fonds de lutte
contre le crime organisé ou le trafic de drogues. Ils demeurent grevés à
concurrence de leur valeur des droits réels licitement constitués aux profits de
tiers.
En cas de confiscation
prononcée par défaut, les biens confisqués sont dévolus à l'Etat et liquidés
suivant les procédures prévues en la matière. Toutefois, si le tribunal,
statuant sur opposition, relaxe la personne poursuivie, il ordonne la
restitution en valeur par l'Etat des biens confisqués, à moins qu'il soit établi
que lesdits biens sont le produit d'un crime ou d'un
délit.
TITRE V
COOPERATION
INTERNATIONALE
Art. 41.
- Dispositions
générales.
Les autorités de Madagascar
s'engagent à coopérer dans la mesure la plus large possible avec celles des
autres Etats aux fins d'échange d'information, d'investigation et de procédure,
visant les mesures conservatoires et les confiscations des instruments et
produits liés au blanchiment, aux fins d'extradition, ainsi qu'aux fins
d'assistance technique mutuelle.
CHAPITRE
PREMIER
DES DEMANDES D'ENTRAIDE
JUDICIAIRE
Art. 42.
- Objet des demandes
d'entraide.
A la requête d'un Etat étranger, les demandes
d'entraide se rapportant aux infractions prévues aux articles 30, 31 et 34 de la
présente Loi sont exécutées conformément aux principes définis par le présent
titre. L'entraide peut notamment inclure :
. le
recueil de témoignages ou de dépositions ;
. la
fourniture d'une aide pour la mise à disposition des autorités de l'Etat
requérant de personnes détenues ou d'autres personnes, aux fins de témoignage ou
d'aide dans la conduite de l'enquête;
. la
remise de documents judiciaires ;
. les
perquisitions et les saisies ;
. l'examen d'objets et de lieux ;
. la
fourniture de renseignements et de pièces à
conviction ;
. la
fourniture des originaux ou des copies certifiées conformes de dossiers et
documents pertinents y compris de relevés bancaires, de pièces comptables, de
registres montrant le fonctionnement d'une entreprise ou ses activités
commerciales.
Art. 43.
- Des refus
d'exécution.
La demande d'entraide ne
peut être refusée que :
a) si
elle n'émane pas d'une autorité compétente selon la législation du pays
requérant, ou si elle n'a pas été transmise
régulièrement ;
b) si son
exécution risque de porter atteinte à l'ordre public, à la souveraineté, à la
sécurité ou aux principes fondamentaux du droit à
Madagascar ;
c) si les
faits sur lesquels elle porte font l'objet de poursuites pénales ou ont déjà fait l'objet d'une décision définitive sur le
territoire de Madagascar ;
d) si
l'infraction visée dans la demande n'est pas prévue par la législation de
Madagascar ou ne présente pas de caractéristiques communes avec une infraction
prévue par sa législation ;
e) si les
mesures sollicitées, ou toutes autres mesures ayant des effets analogues, ne
sont pas autorisées par la législation de Madagascar ou ne sont pas applicables
à l'infraction visée dans la demande, selon la législation de
Madagascar ;
f) si les
mesures demandées ne peuvent être prononcées ou exécutées pour cause de
prescription de l'infraction de blanchiment selon la législation de Madagascar
ou la loi de l'Etat requérant ;
g) si la
décision dont l'exécution est demandée n'est pas exécutoire selon la législation
de Madagascar ;
h) si la
décision étrangère a été prononcée dans des conditions n'offrant pas de
garanties suffisantes au regard des droits de la
défense ;
i) s'il y
a de sérieuses raisons de penser que les mesures demandées ou la décision
sollicitée ne visent la personne concernée qu'en raison de sa race, de sa
religion, de sa nationalité, de son origine ethnique, de ses opinions
politiques, de son sexe ou de son statut ;
j) si la
demande porte sur une infraction politique, ou est motivée par des
considérations d'ordre politique ;
k) si
l'importance de l'affaire ne justifie pas les mesures réclamées ou l'exécution
de la décision rendue à l'étranger.
Le secret bancaire ne peut
être invoqué pour refuser d'exécuter la demande.
Le Ministère public peut
interjeter appel de la décision de refus d'exécution rendue par une juridiction
dans les 3 jours qui suivent cette décision.
Le Gouvernement de Madagascar communique sans délai
au gouvernement étranger les motifs du refus d'exécution de sa
demande.
Art. 44.
- Demande de mesures d'enquête et
d'instruction.
Les mesures d'enquête et
d'instruction sont exécutées conformément à la législation de Madagascar à moins
que les autorités compétentes étrangères n'aient demandé qu'il soit procédé
selon une forme particulière compatible avec sa
législation.
Un magistrat ou un
fonctionnaire délégué par l'autorité compétente étrangère peut assister à
l'exécution des mesures selon qu'elles sont effectuées par un magistrat ou par
un fonctionnaire.
Art. 45.
- Demande de mesures
conservatoires.
La juridiction saisie par une autorité compétente
étrangère aux fins de prononcer des mesures conservatoires ordonne lesdites
mesures sollicitées selon sa propre législation. Elle peut aussi prendre une
mesure dont les effets correspondent le plus aux mesures demandées. Si la
demande est rédigée en termes généraux, la juridiction prononce les mesures les
plus appropriées prévues par la législation.
Dans le cas où elle s'oppose
à l'exécution de mesures non prévues par sa législation, la juridiction saisie
d'une demande prononcée à l'étranger peut leur substituer les mesures prévues
par cette législation dont les effets correspondent le mieux à celles dont
l'exécution est sollicitée.
Les dispositions relatives à
la mainlevée des mesures conservatoires, prévues à l'article 29 alinéa 2 de la présente loi, sont
applicables.
Art. 46. -
Demande de
confiscation.
Dans le cas d'une demande d'entraide judiciaire à
l'effet de prononcer une décision de confiscation, la juridiction statue sur
saisine de l'autorité chargée des
poursuites. La décision de confiscation doit viser un bien, constituant le
produit ou l'instrument d'une infraction, et se trouvant sur le territoire de
Madagascar, ou consister en l'obligation de payer une somme d'argent
correspondant à la valeur de ce bien.
La juridiction saisie d'une demande relative à
l'exécution d'une décision de confiscation prononcée à l'étranger est liée par
la constatation des faits sur lesquels se fonde la décision et elle ne peut
refuser de faire droit à la demande que pour l'un des motifs énumérés à
l’article 43.
Art. 47.
- Sort des biens
confisqués.
L'Etat Malgache jouit du
pouvoir de disposition sur les biens confisqués sur son territoire à la demande
d'autorités étrangères, à moins qu'un accord conclu avec le gouvernement
requérant n'en décide autrement.
CHAPITRE II
DE L'EXTRADITION
Art. 48.
- Obligation
d'extrader.
Les demandes d'extradition des personnes recherchées
aux fins de procédure dans un Etat étranger sont exécutées pour les infractions
prévues aux articles 30, 31 et 34 de la présente loi ou aux fins de faire
exécuter une peine relative à une telle infraction.
Les procédures et les
principes prévus par le traité d'extradition en vigueur entre l'Etat requérant
et Madagascar sont appliqués.
En l'absence de traité d'extradition ou de
dispositions législatives, l'extradition est exécutée selon la procédure et dans
le respect des principes définis par le traité type d'extradition adopté par
l'Assemblée Générale des Nations Unies dans sa résolution
45/116.
Dans tous les cas, les
dispositions de la présente loi, forment la base juridique pour les procédures
d'extradition concernant les infractions visées aux articles 30, 31, 34
§ 1.
Art. 49. -
Double
incrimination.
Aux termes de la présente
loi, l'extradition ne sera exécutée que quand l'infraction donnant lieu à
extradition ou une infraction similaire est prévue dans la législation de l'Etat
requérant et l'Etat Malgache.
Art. 50. -
Motifs obligatoires de
refus.
L'extradition ne peut être
accordée :
a) si
l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée est considérée par
Madagascar comme une infraction de caractère politique, ou si la demande est
motivée par des considérations
politiques ;
b) s'il
existe de sérieux motifs de croire que la demande d'extradition a été présentée
en vue de poursuivre ou de punir une personne en raison de sa race, de sa
religion, de sa nationalité, de son origine ethnique, de ses opinions
politiques, de son sexe ou de son statut, ou qu'il pourrait être porté atteinte
à la situation de cette personne pour l'une de ces
raisons ;
c) si un
jugement définitif a été prononcé à Madagascar à raison de l'infraction pour
laquelle l'extradition est demandée ;
d) si
l'individu dont l'extradition est demandée ne peut plus, en vertu de la
législation de l'un ou l'autre des pays, être poursuivi ou puni, en raison du
temps qui s'est écoulé ou d'une amnistie ou de toute autre
raison ;
e) si l'individu dont l'extradition est demandée a été
ou serait soumis dans l'Etat requérant à des tortures et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants ou s'il n'a pas bénéficié ou ne
bénéficierait pas de garanties minimales prévues au cours des procédures
pénales, par l'article 14 du pacte international relatif aux droits civils et
politiques ;
f) si le
jugement de l'Etat requérant a été rendu en l'absence de l'intéressé et si
celui-ci n'a pas été prévenu suffisamment tôt du jugement et n'a pas eu la
possibilité de prendre des dispositions pour assurer sa défense, et n'a pas pu
ou ne pourra pas faire juger à nouveau l'affaire en sa
présence.
Art. 51. -
Motifs facultatifs de
refus.
L'extradition peut être
refusée :
a) si les
autorités compétentes de Madagascar ont décidé de ne pas engager de poursuites
contre l'intéressé à raison de l'infraction pour laquelle l'extradition est
demandée, ou de mettre fin aux poursuites engagées contre ladite personne à
raison de ladite infraction ;
b) si des
poursuites à raison de l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée
sont en cours à Madagascar contre l'individu dont l'extradition est
demandée ;
c) si l'infraction pour laquelle l'extradition est
demandée a été commise hors du territoire de l'un ou de l'autre pays et que,
selon la législation, Madagascar n'est pas compétent en ce qui concerne les
infractions commises hors de son territoire dans des circonstances
comparables ;
d) si
l'individu dont l'extradition est demandée a été jugé
ou risquerait d'être jugé ou condamné dans l'Etat requérant par une juridiction
d'exception ou un tribunal spécial ;
e) si
Madagascar, tout en prenant aussi en considération la nature de l'infraction et
les intérêts de l'Etat requérant, considère qu'étant donné les circonstances de
l'affaire, l'extradition de l'individu en question serait incompatible avec des
considérations humanitaires, compte tenu de l'age, de l'état de santé ou
d'autres circonstances personnelles dudit individu.
f) si
l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée est considérée par la
législation de Madagascar comme ayant été commise en tout ou en partie sur son
territoire ;
g) si l'individu dont l'extradition est demandée
encourt la peine de mort pour les faits reprochés dans le pays requérant, à
moins que celui-ci n'offre des garanties suffisantes que la peine ne sera pas
exécutée ;
h) si
l'individu dont l'extradition est demandée est un ressortissant de
Madagascar.
Art. 52. -
Obligation en cas de refus
d'extradition.
Si Madagascar refuse
l'extradition pour un motif visé aux points f) ou g) de l'article 51, il soumettra l'affaire, à la demande de
l'Etat requérant, à ses autorités compétentes afin que des poursuites
puissent être engagées contre
l'intéressé pour l'infraction ayant motivé la demande.
Art. 53.
- Remise
d'objets.
Dans les limites autorisées par la législation
nationale et sans préjudice des droits des tiers, tous les biens trouvés sur le
territoire de Madagascar dont l'acquisition est le résultat de l'infraction
commise ou qui peuvent être requis comme éléments de preuve sont remis à l'Etat
requérant, si celui-ci le demande et si l'extradition est
accordée.
Les biens en question peuvent, si l'Etat requérant le
demande, être remis à cet Etat même
si l'extradition accordée ne peut pas être réalisée.
Lorsque lesdits biens sont susceptibles de saisie ou de confiscation sur le
territoire de Madagascar, l'Etat pourra, temporairement, les garder ou les
remettre.
Lorsque la législation
nationale ou les droits des tiers l'exigent, les biens ainsi remis seront
retournés à Madagascar sans frais, une fois la procédure achevée, si Madagascar
le demande.
CHAPITRE III
DISPOSITIONS COMMUNES AUX
DEMANDES
D'ENTRAIDE ET AUX DEMANDES
D'EXTRADITION
Art. 54.
- Nature politique de
l'infraction.
Au sens de la présente loi,
les infractions visées aux articles 30, 31, et 34 §1 ne seront pas considérées
comme des infractions de nature politique.
Art. 55.
- Transmission des
demandes.
Les demandes adressées par des autorités compétentes
étrangères aux fins d'établir des faits de blanchiment, aux fins d'exécuter ou
de prononcer des mesures conservatoires ou une confiscation, ou aux fins
d'extradition sont transmises par voie diplomatique. En cas d'urgence, elles
peuvent faire objet d'une communication par l'intermédiaire de l'Organisation
Internationale de Police Criminelle (OIPC/Interpol) ou de communications
directes par les autorités étrangères, aux autorités judiciaires de Madagascar,
soit par la poste, soit par tout autre moyen de transmission plus rapide,
laissant une trace écrite ou matériellement équivalente. En pareil cas, faute
d'avis donné par la voie diplomatique, les demandes n'ont pas de suite
utile.
Les demandes et leurs
annexes doivent être accompagnées d'une traduction dans une langue acceptable
par Madagascar.
Art. 56.
- Contenu des
demandes.
Les demandes doivent
préciser :
4. les
faits qui la justifient ;
5. tous
éléments connus susceptibles de faciliter l'identification des personnes
concernées et notamment l'état civil, la nationalité, l'adresse et la
profession ;
6. tous
renseignements nécessaires pour identifier et localiser les personnes,
instruments, ressources ou biens visés ;
7. le
texte de la disposition légale créant l'infraction ou, le cas échéant, un exposé
du droit applicable à l'infraction, et l'indication de la peine encourue pour
l'infraction.
En outre, les demandes
doivent contenir les éléments suivants dans certains cas
particuliers :
1. en cas
de demande de prise de mesures conservatoires, un descriptif des mesures
demandées ;
2. en cas
de demande de prononcé d'une décision de confiscation, un exposé des faits et
arguments pertinents devant permettre aux autorités judiciaires de prononcer la
confiscation, en vertu du droit interne ;
3. en cas
de demande d'exécution d'une décision de mesures conservatoires ou de
confiscation :
. une
copie certifiée conforme de la décision et, si elle ne les énonce pas, l'exposé
de ses motifs ;
. une
attestation selon laquelle la décision est exécutoire et n'est pas susceptible
de voies de recours ordinaires ;
. l'indication des limites dans lesquelles la décision doit être
exécutée et, le cas échéant, du montant de la somme à récupérer sur le ou les
biens ;
. s'il y
a lieu et si possible, toutes indications relatives aux droits que des tiers
peuvent revendiquer sur les instruments, ressources, biens ou autres choses
visés,
4. en cas de demande d'extradition, si l'individu a été
reconnu coupable d'une infraction, le jugement ou une copie certifiée conforme
du jugement ou de tout autre document établissant que la culpabilité de
l'intéressé a été reconnue et indiquant la peine prononcée, le fait que le
jugement est exécutoire et la mesure dans laquelle la peine n'a pas été
exécutée.
Art. 57.
- Traitement des
demandes.
Le Ministre de
Le Ministère public saisit
les fonctionnaires compétents des demandes d'investigation et la juridiction
compétente en ce qui concerne les demandes relatives aux mesures conservatoires,
aux confiscations et à l'extradition.
Un magistrat ou un fonctionnaire délégué par
l'autorité compétente étrangère peut assister à l'exécution des mesures selon
qu'elles sont effectuées par un magistrat ou par un
fonctionnaire.
Art. 58.
- Compléments
d'information.
Le Ministre de
Art. 59.
- Demande de
confidentialité.
Lorsque la requête demande
que son existence et sa teneur soient tenues confidentielles, il y est fait
droit, sauf dans la mesure indispensable pour y donner effet. En cas
d'impossibilité, les autorités requérantes doivent en être informées sans
délai.
Art. 60.
- Sursis à
l'exécution.
Le Ministère public ne peut surseoir à saisir les
autorités de police ou la juridiction que si les mesures ou la décision demandée
risquent de porter préjudice à des investigations ou à des procédures en cours.
Il doit en informer immédiatement l'autorité requérante par voie diplomatique ou
directement.
Art. 61.
- Procédure d'extradition
simplifiée.
Pour les infractions prévues
par la présente loi et lorsque l'individu dont l'extradition est demandée y
consent explicitement, Madagascar peut accorder l'extradition après réception de
la demande d'arrestation provisoire.
Art. 62.
- Non utilisation des éléments de
preuve pour d'autres fins.
La communication ou l'utilisation, pour des enquêtes
ou des procédures autres que celles prévues par la demande étrangère, des
éléments de preuve que celle-ci contient est interdite à peine de nullité des
dites enquêtes et procédures, sauf consentement préalable du gouvernement
étranger.
Art. 63.
- Imputation des
frais.
Les frais exposés pour exécuter les demandes prévues
au présent titre sont à la charge de l'Etat Malgache, à moins qu'il en soit
convenu autrement avec le pays requérant.
TITRE VI
DISPOSITIONS DIVERSES
Art. 64.
- Sans préjudice de l'application
des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 30 de la présente loi, le minimum
d'amende fixée à l'article 102 de la loi n° 97‑039 du 4 novembre 1997 est
porté à 500.000 de Fmg ou 100.000 ariary.
Art. 65.
- La présente loi sera publiée au
Journal officiel de
Promulguée à Antananarivo,
le 19 août 2004
Marc
RAVALOMANANA