Ordonnance 78
ORDONNANCE
N° 62-038 DU 19 SEPTEMBRE 1962
sur la protection de l’enfance
(J.O.n° 244 du 28.09.62, p. 1983)
TITRE
PREMIER
DISPOSITIONS GENERALES
Article premier - L’enfant occupe au sein de la famille une place
privilégiée: il a droit à une sécurité matérielle et morale aussi complète que
possible.
Art. 2 - La responsabilité de son éducation appartient en
premier lieu à la famille; celle-ci doit assurer le développement harmonieux de
sa personnalité.
Art. 3 - Toutefois,
lorsque la sécurité, la moralité, la santé ou l’éducation d’un mineur de
dix-huit ans sont compromises, l’Etat intervient, soit pour aider et assister
la famille dans son rôle d’éducateur naturel de l’enfant, soit pour prendre des
mesures d’assistance éducative et de surveillance appropriées, soit enfin,
lorsque les circonstances et la personnalité de l’enfant paraîtront l’exiger,
pour déférer le mineur à des juridictions spécialisées de l’ordre judiciaire.
Art. 4 - La
majorité pénale demeure fixée à dix-huit ans. L’âge du mineur s’apprécie au
moment où il a commis l’infraction.
La preuve de la minorité résulte, soit d’un acte de
naissance, soit d’un jugement supplétif, soit d’un examen somatique qui tient
lieu d’acte de naissance ou de jugement supplétif.
TITRE
II
DU REGIME DES CONTRAVENTIONS
Art. 5 - Les contraventions commises par les mineurs de
dix-huit ans sont poursuivies et sanctionnées conformément au droit commun,
sous réserve des dispositions suivantes.
Art. 6 - Si le mineur est âgé de moins de treize ans, il ne
pourra faire l’objet que d’une admonestation du tribunal de simple police.
Art. 7 - Si le mineur est âgé de plus de treize ans et de
moins de dix-huit ans et si la prévention est établie, le tribunal de simple
police prononcera la peine d’amende prévue par la loi. Il pourra, en outre,
transmettre après le jugement le dossier au juge des enfants qui aura la
faculté de placer le mineur sous le régime de la liberté surveillée.
Même en cas de récidive, le mineur ne pourra être puni
d’emprisonnement pour contravention.
TITRE
III
DE LA PROCEDURE DEVANT LE JUGE DES ENFANTS
Art. 8 - Dans les juridictions dont l’effectif le permet, un
magistrat délégué dans les fonctions de juge des enfants est spécialement
chargé de la protection judiciaire :
1° Des mineurs délinquants ;
2° Des mineurs, dont la sécurité, la moralité, la
santé ou l’éducation se trouvent compromises.
Dans les autres juridictions, les attributions du juge
des enfants sont exercées par le président ou par un juge désigné par lui.
Art. 9 - Le juge des enfants compétent est celui du domicile
ou de la résidence du mineur, du lieu où il aura été trouvé, ou du lieu de
l’infraction.
Art. 10 - Lorsqu’il convient seulement de prendre de mesures de
protection, le juge des enfants est saisi par le procureur de la République,
par les parents, par le représentant légal ou par l’enfant lui-même : il peut,
en outre, se saisir d’office.
Après avoir prescrit le cas échéant, une enquête
sociale et un examen médical dans les conditions prévues aux articles 11 et 12,
il ordonne la remise du mineur à ses parents, à son représentant légal, à une
personne digne de confiance ou à une institution agréée par l’Etat.
Art. 10 - En cas de délit, le juge des enfants est saisi
par le procureur de la République ou par la personne lésée.
L’information est secrète: les dispositions du Code de
procédure pénale sur les droits de la défense ne lui sont pas applicables.
Le juge des enfants entend le mineur, ses parents, les
personnes ayant autorité sur lui, ainsi que toutes celles dont il estime utile
la déposition.
Il fait tous actes d’instruction qu’il estime utiles à
la manifestation de la vérité en se conformant aux dispositions du Code de
procédure pénale.
Il peut ordonner une enquête sociale ayant pour objet
de parvenir à la connaissance de la personnalité du mineur; cette enquête
portera notamment sur ses antécédents, sa fréquentation scolaire, les
conditions matérielles et morales dans lesquelles il vit, les moyens appropriés
à sa rééducation.
Il a également la faculté de prescrire un examen
médical.
Il peut décerner tous mandats utiles en observant les
règles du droit commun.
Art. 12 - Pendant
l’enquête, le juge des enfants peut confier par ordonnance le mineur à ses
parents, à son tuteur, à une personne digne de confiance, ou à une institution
agréée par l’Etat, ou le faire retenir dans un hôpital ou dans un établissement
susceptible de lui donner les soins que réclamerait sa santé.
Il peut édicter à l’égard de la personne ou de
l’institution qui reçoit la garde toutes mesures de contrôle ou de surveillance
nécessaires.
La mesure de garde est toujours révocable.
Art. 13 - L’enquête terminée, le dossier est communiqué au
parquet, qui est tenu de prendre des conclusions écrites et motivées.
Art. 14 - S’il estime que l’intérêt social et celui du mineur
exigent une mesure de placement dans un centre de rééducation ou une sanction
pénale, le juge des enfants, ordonne le renvoi de l’affaire devant le tribunal
pour enfants.
Si le mineur a des coauteurs ou des complices majeurs,
ces derniers seront renvoyés devant le tribunal correctionnel: les poursuites
contre le mineur seront disjointes par le juge des enfants, qui le renverra par
la même ordonnance de règlement devant le tribunal pour enfants.
Art. 15 - Dans les autres cas, le juge des enfants entend en
chambre du conseil et en présence du ministère public, le mineur, ses parents,
le gardien et toute personne dont la présence lui apparaît utile. Le ministère
public prend ses réquisitions. Le conseil du mineur, si ce dernier se trouve
assisté, a la parole.
Art. 16 - Le juge des enfants statue ensuite par jugement en
chambre du conseil.
Art. 17 - S’il estime que la prévention n’est pas fondée, il
prononce la relaxe du mineur.
Art. 18 - S’il décide que la prévention est fondée, il peut :
- admonester l’enfant ;
- le remettre à ses parents, à son tuteur, à la
personne qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance ;
- le placer sous le régime de la liberté surveillée,
dans les conditions prévues au titre neuvième de la présente ordonnance.
TITRE
IV
DE LA PROCEDURE DEVANT LE JUGE D’INSTRUCTION
Art. 19 - En aucun cas, il ne pourra être suivi contre les
mineurs par la procédure de l’information sommaire.
Art. 20 - La compétence territoriale du juge d’instruction est
déterminée par les mêmes règles que celle du juge des enfants.
Art. 21 - Le juge d’instruction est saisi par le procureur de
la République quand il s’agit d’un crime.
Art. 22 - A défaut de choix d’un
défenseur par le mineur ou la personne qui le représente, le juge d’instruction
lui fera commettre un avocat d’office.
Art. 23 - Le juge d’instruction pourra ordonner une enquête
sociale et un examen médical, dans les conditions prévues à l’article 11. Pour
le surplus, il procédera à l’égard du mineur dans les formes du code de
procédure pénale, sous réserve des dispositions de l’article suivant.
Art. 24 - Pendant
l’information, le juge d’instruction pourra confier provisoirement le mineur,
conformément aux dispositions de l’article 12.
Il ne placera sous mandat de dépôt le mineur de 13 ans
qu’en cas de crime ayant apporté ou susceptible d’apporter des troubles graves
à l’ordre public: en ce cas, l’intéressé sera détenu dans le quartier réservé
aux mineurs, ou à défaut, dans un local spécial.
Art. 25 - L’information terminée, le juge d’instruction rend,
sur les réquisitions du procureur de la République, selon les circonstances :
Soit une ordonnance de non-lieu ;
Soit une ordonnance de renvoi devant le tribunal de
police, si le fait constitue une contravention ;
Soit une ordonnance de renvoi devant le tribunal pour
enfants, si le fait constitue un délit ;
Soit une ordonnance de renvoi devant la cour
criminelle des mineurs, si le fait constitue un crime puni d’une peine
inférieure à celle des travaux forcés à perpétuité ;
Soit une ordonnance de transmission des pièces à la
Chambre d’accusation, si le fait constitue un crime puni de mort, des travaux
forcés à perpétuité ou de la déportation.
Art. 26 - En cas de poursuite pour crime passible d’une peine
inférieure à celle des travaux forcés à perpétuité, le juge d’instruction
renverra le mineur devant la cour
criminelle des mineurs, et les majeurs devant la cour criminelle de droit
commun.
En cas de crime puni de mort, des travaux forcés à
perpétuité ou de la déportation, le juge d’instruction rendra une ordonnance de
transmission des pièces à l’encontre de tous les inculpés. Prononçant la
disjonction, la Chambre d’accusation renverra le mineur devant la cour
criminelle des mineurs, et les majeurs devant la cour criminelle de droit
commun.
TITRE V
DU TRIBUNAL POUR ENFANTS
CHAPITRE PREMIER
Composition
Art. 27 - Il est créé par décret, au siège des tribunaux de
première instance dont l’effectif le permet, une chambre spéciale dite
«Tribunal pour enfants».
Art. 28 - Le tribunal pour enfants est constitué par le juge
des enfants, assisté de deux assesseurs.
Art. 29
- Le juge des enfants est
choisi, compte tenu de l’intérêt qu’il porte aux questions de l’enfance et de
ses aptitudes, parmi les juges du tribunal de première instance.
Il est délégué dans ses fonctions par ordonnance du
premier président de la cour d’appel pour une durée de deux années
renouvelable.
En cas d’empêchement momentané du juge des enfants, le
président du tribunal exerce ses attributions ou désigne l’un des juges pour le
remplacer.
Art. 30 - Les assesseurs titulaires ou suppléants sont nommés
pour un an par arrêté du Ministre de la Justice.
Ils sont choisis parmi les personnes de l’un ou de
l’autre sexe âgées de plus de trente ans, jouissant de leurs droits civiques et
politiques, et s’étant signalées par leur compétence et par l’intérêt qu’elles
portent aux questions de l’enfance.
Avant d’entrer en fonctions, ils prêtent serment
devant la juridiction de bien et fidèlement remplir leurs fonctions et de
garder religieusement le secret des délibérations.
Art. 31 - Dans les juridictions où il n’a pas été créé un
tribunal pour enfants, les attributions de ce dernier sont exercées par le
président ou un juge désigné par lui.
CHAPITRE II
Compétence
Art. 32 - Le tribunal pour enfants connaît de tous les délits
commis par des mineurs de 18 ans.
Il est saisi, soit par ordonnance de renvoi du juge
des enfants, soit par voie de citation directe.
Dans ce dernier cas, le tribunal pour enfants peut
ordonner une enquête sociale ou un examen médical, et confier pour la durée de
ces diligences le mineur à l’une des personnes visées à l’article 12.
Il peut décerner tous mandats utiles en observant les
règles de droit commun.
CHAPITRE III
Procédure
Art. 33 - Chaque affaire sera jugée séparément, en l’absence
des mineurs impliqués dans les autres affaires inscrites au rôle de l’audience.
Les débats auront lieu à huis clos. Seront seuls admis
à y assister le mineur et son conseil, les père et mère ou à défaut le
représentant légal, le gardien, les membres du barreau, les représentants des
institutions ou services se consacrant aux enfants, les témoins. Les coauteurs
ou complices majeurs pourront être entendus à titre de simples renseignements.
Le président aura le droit, à tout moment, d’ordonner
que le mineur se retire pendant tout ou partie de la suite des débats. Si
l’intérêt de l’enfant l’exige, il pourra même dispenser ce dernier de
comparaître à l’audience: en ce cas, le mineur sera représenté par son avocat,
et la décision à intervenir sera réputée contradictoire.
La publication du compte-rendu des débats du tribunal
pour enfants, de quelque manière que ce soit, est interdite.
Art. 34 - Le
jugement sera rendu en audience publique en la présence du mineur et pourra
être publié, mais sans que le nom du mineur puisse être indiqué, même par une
initiale, sous peine d’une amende de 10.000 à 100.000 francs.
CHAPITRE
IV
Jugement
Art. 35 - Si la prévention est établie à l’égard d’un mineur
de treize ans, le tribunal pour enfants ne pourra prendre à son encontre qu’une
simple mesure éducative: remise aux parents, au tuteur, à la personne qui en
avait la garde ou à une personne digne de confiance.
Art. 36 - Si la prévention est établie à l’égard d’un mineur
de treize à seize ans, le tribunal pour enfants délibérera sur la question de
sa responsabilité pénale :
- si celle-ci est retenue, l’excuse atténuante de
minorité jouera de plein droit: la peine prononcée contre le mineur ne pourra
s’élever au-dessus de la moitié de celle à laquelle il aurait été condamné s’il
avait été majeur au moment de l’infraction ;
- si au contraire, l’irresponsabilité pénale est
admise, le tribunal pour enfants ordonnera, soit l’une des mesures éducatives
visées à l’article précédent, soit le placement du mineur dans un centre de
rééducation pour une période déterminée, qui ne pourra excéder l’époque où
l’intéressé aura atteint l’âge de 21 ans.
Art. 37 - Si la prévention est établie à l’égard d’un mineur
de 16 à 18 ans, les dispositions de l’article 36 seront applicables. Toutefois,
le tribunal pour enfants aura la faculté d’écarter, par décision spéciale et
motivée, l’excuse atténuante de minorité.
Art. 38 - La cour criminelle des mineurs connaît de tous les
crimes commis par des mineurs de dix huit
ans.
Art. 39 - Elle est composée à Tananarive :
- d’un conseiller à la cour d’appel désigné par le
premier président pour suivre plus spécialement les affaires des mineurs, président ;
- du juge des enfants, membre ;
- de trois assesseurs tirés au sort parmi les
assesseurs au tribunal pour enfants et les délégués à la liberté surveillée, ou
à défaut sur la liste annuelle d’assesseurs à la cour criminelle
d’Antananarivo.
Les fonctions du ministère public auprès de la cour
criminelle des mineurs de Tananarive sont remplies par un magistrat du parquet
général spécialement chargé des affaires de mineurs.
Art. 40 - Au siège des cours criminelles où existe un tribunal
pour enfants, la cour criminelle des mineurs est composée:
- du président de la cour criminelle, président ;
- du juge des enfants ou d’un magistrat du ressort, membre,
- de trois assesseurs tirés au sort dans les
conditions prévues à l’article 39.
Art. 40 - Les autres cours criminelles se constituent en cour
criminelle des mineurs, lorsqu’elles sont appelées à juger des mineurs de 18
ans.
Art. 42 - Les dispositions des articles 33 et 34, relatives à
la procédure suivie devant le tribunal pour enfants, sont applicables devant la
cour criminelle des mineurs.
Art. 43 - Si l’accusé est mineur de 13 ans, les mesures éducatives
de l’article 35 pourront seules être prescrites.
Art. 44 - Si l’accusé a plus de 13 ans et moins de 16 ans et
si son irresponsabilité pénale est admise, la cour criminelle des mineurs
prononcera les mesures éducatives prévues à l’article 36, paragraphe 3.
Art. 45 - Si la cour criminelle des mineurs retient la
responsabilité pénale d’un mineur de 13 à 16 ans, l’excuse atténuante de
minorité sera de droit et la peine sera appliquée conformément aux dispositions
suivantes:
1° S’il a encouru la peine de mort, des travaux forcés
à perpétuité ou de la déportation, il sera condamné à une peine de dix à vingt
ans d’emprisonnement;
2° S’il a encouru la peine des travaux forcés à temps,
de la détention ou de la réclusion, il sera condamné à l’emprisonnement pour un
temps égal à la moitié au plus de celui pour lequel il aurait pu être condamné
à l’une de ces peines;
3° S’il a encouru la peine de la dégradation civique,
il sera condamné à l’emprisonnement pour deux ans au plus.
Art. 46 - Si l’accusé a plus de 16 ans et moins de 18 ans, les
dispositions des deux articles précédents seront applicables. Toutefois la cour
criminelle des mineurs aura la faculté d’écarter, par décision spéciale et
motivée, l’excuse atténuante de minorité.
En aucun cas, la peine de mort ne pourra être
prononcée contre un mineur de 18 ans.
TITRE
VII
DES VOIES DE RECOURS
Art. 47 - L’ordonnance de renvoi devant le tribunal pour
enfant n’est susceptible d’aucun recours.
Art. 48 - Toutes les autres ordonnances du juge des enfants
peuvent être attaquées par la voie de l’appel devant la Chambre d’accusation,
dans les mêmes conditions de forme et de délai que les ordonnances du juge
d’instruction.
Les mesures provisoires ordonnées par le juge des
enfants peuvent à tout moment être par lui modifiées ou rapportées, soit
d’office, soit à la requête du mineur, de ses père et mère, du représentant
légal ou du procureur de la République.
Art. 49 - Les jugements rendus par le tribunal de simple
police, par le juge des enfants conformément aux articles 15 à 18 de la
présente ordonnance, et par le tribunal pour enfants, peuvent être attaqués par
la voie de l’appel qui sera exercée dans
les forme et délai de droit commun.
Ouvert au mineur ou à son représentant légal, au
procureur de la République et au procureur général, l’appel est suspensif, sauf
la faculté pour le juge des enfants et pour le tribunal pour enfants d’ordonner
l’exécution provisoire de leurs décisions.
L’appel est porté devant la chambre correctionnelle de
la cour, qui devra comprendre parmi ses membres le conseiller délégué à la
protection de l’enfance.
La cour siège en chambre de conseil. Elle peut statuer
sur pièces, si la comparution personnelle du mineur n’est pas estimée
nécessaire: dans ce cas, l’arrêt est réputé contradictoire.
Art. 50 - Les arrêts des cours criminelles de mineurs sont
susceptibles des mêmes voies de recours que ceux des cours criminelles de droit
commun.
TITRE
VIII
DES INTERETS CIVILS
Art. 51 - L’action civile sera exercée conformément au droit
commun devant le tribunal de simple police, le juge des enfants, le juge
d’instruction, le tribunal pour enfants et la cour criminelle des mineurs.
Art. 52 - Toute personne qui s’estimera lésée par un crime ou
un délit commis par un mineur aura la faculté avant toute poursuite du parquet,
de porter plainte en se constituant partie civile et de mettre ainsi en
mouvement l’action publique ; mais alors elle ne pourra le faire à peine
de nullité que devant les juges des enfants ou devant le juge d’instruction.
TITRE
IX
DU REGIME DE LA LIBERTE SURVEILLEE
Art. 53 - Les mesures éducatives ou les sanctions pénales
prises par le juge des enfants, le tribunal pour enfants, la cour d’appel et la
cour criminelle des mineurs pourront toujours être assorties du régime de la
liberté surveillée jusqu’à un âge qui ne pourra excéder vingt et un ans.
La rééducation des mineurs en liberté surveillée sera
assurée, sous l’autorité du juge des enfants, par des délégués bénévoles.
Art. 54 - Les délégués bénévoles sont choisis parmi les
personnes de l’un ou l’autre sexe âgées de vingt-cinq ans au moins, de bonne
moralité et jouissant de leurs droits civiques et politiques.
Art. 55 - La liste des délégués bénévoles pour le ressort de
chaque tribunal est établie annuellement par le Ministre de la Justice sur
proposition du juge des enfants. Cette liste n’est pas limitative.
Art. 56 - En outre, un
délégué permanent peut être désigné auprès du juge des enfants. Il a pour
mission de cordonner et de diriger l’action des délégués bénévoles, et
d’assumer la rééducation des mineurs que le juge lui a confiés personnellement.
Art. 57 - Dans chaque affaire, le délégué est désigné soit
immédiatement par le jugement, soit ultérieurement par ordonnance du juge des
enfants. Autant que possible, le délégué bénévole sera choisi parmi les
personnes appartenant à la même communauté, à la même collectivité ou au même
milieu social que le mineur.
Il pourra notamment être désigné parmi les membres du
conseil communal ou de l’assemblée des notables du fokonolona.
Art. 58 - Dans tous les cas où le régime de la liberté
surveillée est prescrit, le mineur, ses parents ou son représentant légal, la
personne qui en a la garde, seront avertis du caractère et de l’objet de cette
mesure et des obligations qu’elle comporte.
Art. 59 - Le délégué à la liberté surveillée fera rapport au
juge des enfants en cas de mauvaise conduite, de péril moral du mineur,
d’entraves systématiques à l’exercice de la surveillance, ainsi que dans le cas
où une modification de placement ou de garde lui paraîtra utile.
En cas de décès, de maladies graves, de changement de
résidence ou d’absence non autorisée du mineur, les père et mère ou les
personnes qui ont la charge de l’enfant devront sans retard en informer le
délégué.
Art. 60 - Si un incident à la liberté surveillée révèle un
défaut de surveillance caractérisé de la part des parents ou des personnes qui
ont la charge de l’enfant, ou encore des entraves systématiques à l’exercice de
la mission du délégué, le juge des enfants, quelle que soit la décision prise à
l’égard du mineur, pourra condamner les parents ou les personnes qui en ont la
charge à une amende de 1.000 à 25.000 francs.
Art. 61 - Le juge des enfants pourra, soit d’office, soit à la
requête du ministère public, du mineur, de ses parents, de son représentant
légal, de la personne qui en a la charge, soit sur le rapport du délégué à la
liberté surveillée, statuer sur tous les incidents, instances en modification
de placement ou de garde, demandes de remise de garde. Il pourra ordonner
toutes mesures de protection ou de surveillance
utiles, rapporter ou modifier les mesures prises.
Le tribunal pour enfants sera, le cas échéant, investi
du même droit.
Art. 62 - S’il est établi qu’un mineur de 13 à 18 ans, par sa
mauvaise conduite opiniâtre, son indiscipline constante ou son comportement
dangereux, rend inopérantes les mesures de protection ou de surveillance déjà
prises en son égard, la juridiction qui a statué pourra, par décision motivée,
le placer jusqu’à un âge qui ne saurait excéder vingt et un ans dans un centre
de rééducation.
Art. 63 - Sont compétents pour statuer sur tous incidents,
instances modificatives de placement ou de garde, demande de remise de garde:
1° le juge des enfants ou le tribunal pour enfants
ayant primitivement statué ou, sur délégation de compétence, le juge des
enfants ou le tribunal pour enfants du domicile des parents ou du lieu où le
mineur se trouvera, en fait, placé;
2° si la décision initiale émane de la cour d’appel ou
de la cour criminelle des mineurs, le juge des enfants ou le tribunal pour
enfants du domicile des parents ou de la résidence actuelle du mineur.
Art. 64 - Si
l’affaire requiert célérité, toute mesure provisoire pourra être ordonnée par
le juge des enfants du lieu où le mineur se trouvera, en fait, placé ou arrêté.
Art. 65 - Toute personne, à laquelle est remis un mineur par
application des dispositions de l’Article 12, pourra prétendre à une indemnité
journalière fixée par décret.
TITRE
X
DES MAGISTRATS ET DES SERVICES SPECIALISES
Art. 66 - Au parquet général, un magistrat désigné par le
procureur général sera spécialement chargé de suivre les affaires des mineurs
et de suggérer toutes mesures susceptibles d’améliorer et de rendre plus
efficace la protection de l’enfance.
Art. 67 - Au sein de la cour d’appel, un magistrat désigné par
le premier président est chargé de suivre plus spécialement les affaires des
mineurs. Il prend le titre de conseiller délégué à la protection de l’enfance.
Il est, de droit, président de la cour criminelle des
mineurs de Tananarive.
Il siège, en qualité de président ou de conseiller
rapporteur, à la chambre correctionnelle de la cour d’appel, lorsque celle-ci
connaît d’une affaire dans laquelle un mineur est impliqué.
Art. 68 - Dans les tribunaux dont l’effectif le permet, un
juge d’instruction désigné par le président de la juridiction est plus
spécialement chargé des affaires concernant les mineurs.
Art. 69 - Il peut
être institué par décret auprès des tribunaux de première instance un service
social chargé, sous le contrôle conjoint du juge des enfants et du procureur de
la République, d’effectuer des enquêtes et de seconder le juge des enfants.
A défaut, les enquêtes seront confiées à des
assistances sociales agrées par le Ministre de la Justice ou à des personnes
majeures jouissant de leurs droits civiques et politiques et possédant les
connaissances psychologiques, juridiques et administratives nécessaires.
TITRE
XI
DISPOSITIONS DIVERSES
Art. 70 - Dans toutes les matières qui ne
sont pas régies par la présente ordonnance, il sera procédé conformément
au Code de procédure pénale.
Art. 71 - Sont et demeurent abrogées toutes dispositions
antérieures contraires à celles de la présente ordonnance, notamment les
décrets du 30 novembre 1928 et du 31 juillet 1936 relatifs à la protection de
l’enfance à Madagascar ainsi que l’ordonnance n° 60-142 du 3 octobre 1960 sur
la protection de l’enfance.
_____________