Lois 308
LOI
du 15 juin 1872
relative
aux titres au porteur, modifiée par Loi du 8 février 1902 R. appl. 22/02/12, V. L. 28/07/42 (Col. 1, p. 71 RTL I.)
Article premier - Le propriétaire de titres au porteur, qui en est dépossédé
par quelque événement que ce soit, peut se faire restituer contre cette perte,
dans la mesure et sous les conditions déterminées par la présente loi.
Art. 2 - (L. du 08/02/02) Le propriétaire dépossédé fera notifier par
huissier, au syndicat des agents de change de Paris, un acte d'opposition
indiquant le nombre, la nature, la valeur nominale, le numéro et, s’il y a
lieu, la série des titres, avec réquisition, sous la condition de payement du
coût, de publier, dans la forme qui sera ci-après déterminée, les numéros des
titres dont il a été dépossédé.
Il devra aussi, autant que
possible, énoncer :
1°
l’époque et le lieu où il est devenu propriétaire, ainsi que le mode de
son acquisition ;
2°
l’époque et le lieu où il a reçu les derniers intérêts ou
dividendes ;
3°
les circonstances qui ont accompagné sa dépossession.
Cet acte contiendra une
élection de domicile à Paris.
Notification sera également faite par huissier au nom du propriétaire dépossédé, à l’établissement débiteur.
L’Acte contiendra les indications ci-dessus requises
pour l’exploit notifié au syndicat des agents de change, et de plus, à peine de
nullité, une copie certifiée par l’huissier instrumentaire de la quittance
délivrée par le syndicat, du coût de la publication prévue par l’article 11
ci-après, cette quittance soumise au seul droit de timbre de dix centimes (0
fr. 10), s’il y échet, sera dispensée d’enregistrement. Il sera fait dans
l’acte élection de domicile dans la commune du siège de l’établissement
débiteur.
La notification ainsi faite emportera opposition au
payement tant du capital que des intérêts ou dividendes échus ou à échoir,
jusqu’à ce que mainlevée en ait été donnée par l’opposant ou ordonnée par
justice, ou jusqu’à ce que déclaration ait été faite, par le syndicat des
agents de change, à l’établissement débiteur, de la radiation de l’opposition.
S’il s’agit de coupons détachés du titre, il n’y aura
pas lieu à la notification au syndicat des agents de change, ni à l’insertion
au bulletin quotidien. Le porteur dépossédé ne sera tenu que de l’opposition à
l’établissement débiteur.
Art. 3 - (L. du 08/02/02) Lorsqu’il se sera écoulé une
année depuis l’opposition sans qu’elle ait été formellement contredite par un
tiers se prétendant propriétaire du titre frappé d’opposition, et que, dans cet
intervalle, deux termes au moins d’intérêts ou de dividendes auront été mis en
distribution, l’opposant pourra se pourvoir auprès du président du tribunal
civil du lieu de son domicile, ou, s’il habite hors de France, auprès du
président du tribunal civil du siège de l’établissement débiteur, afin
d’obtenir l’autorisation de toucher les intérêts ou dividendes échus, ou même
le capital des titres frappés d’opposition, dans le cas où ledit capital serait
ou deviendrait exigible.
Le même droit appartiendra
au porteur dépossédé de titres ne donnant pas droit à des intérêts ou
dividendes, ou à l’égard desquels il y a eu cessation des distributions
périodiques. Mais, en ce cas, il ne pourra être exercé que lorsqu’il se sera
écoulé trois ans depuis l’opposition sans qu’elle ait été contredite dans les
termes indiqués ci-dessus.
Art. 4 - (L. du 08/02/02) Si le président accorde l’autorisation, l’opposant
devra, pour toucher les intérêts ou dividendes, fournir une caution solvable
dont l’engagement s’étendra au montant des annuités exigibles, et, de plus, à
une valeur double de la dernière annuité échue.
Après deux ans écoulés depuis l’autorisation, sans
que l’opposition ait été contredite dans les termes de l’article 3, la caution
sera, de plein droit, déchargée.
Si l’opposant ne veut ou ne
peut fournir la caution requise, il pourra, sur le vu de l’autorisation, exiger
de la compagnie le dépôt, à la caisse des dépôts et consignations, des intérêts
ou dividendes échus et de ceux à échoir au fur et à mesure de leur exigibilité.
Après deux ans écoulés
depuis l’autorisation, sans que l’opposition ait été contredite dans les termes
de l’article 3, l’opposant pourra retirer de la caisse des dépôts et consignations
les sommes déposées et percevoir librement les intérêts ou dividendes à échoir,
au fur et à mesure de leur exigibilité.
Art. 5 - (L. du 08/02/02) Si le capital des titres
frappés d’opposition est devenu exigible, l’opposant qui aura obtenu l’autorisation
ci-dessus pourra en toucher le montant, à charge de fournir caution. Il pourra,
s’il le préfère, exiger de la compagnie que le montant dudit capital soit
déposé à la caisse des dépôts et consignations.
Lorsqu’il se sera écoulé dix
ans depuis l’époque de l’exigibilité et cinq ans au moins à partir de
l’autorisation sans que l’opposition ait été contredite dans les termes de
l’article 3, la caution sera déchargée, et s’il y a eu dépôt, l’opposant pourra
retirer de la caisse des dépôts et consignations, les sommes en faisant
l’objet.
Art. 6 - La solvabilité de la caution
à fournir en vertu des dispositions des articles précédents sera appréciée
comme en matière commerciale. S’il s’élève des difficultés, il sera statué en
référé par le président du tribunal du domicile de l’établissement débiteur.
Il sera loisible à
l’opposant de fournir un nantissement aux lieu et place d’une caution. Ce
nantissement pourra être constitué en titres de rentes sur l’Etat. Il sera
restitué à l’expiration des délais fixés pour la libération de la caution.
Art. 7 - (L. 08/02/02) En cas de refus de
l’autorisation dont il est parlé en l’article 3, l’opposant pourra saisir, par
voie de requête, le tribunal civil de son domicile, ou, s’il habite hors de
France, le tribunal civil du siège de l’établissement débiteur, lequel statuera
après avoir entendu le ministère public. Le jugement obtenu dudit tribunal
produira les effets attachés à l’ordonnance d’autorisation.
Art. 8 - Quand il s’agira de coupons
au porteur détachés du titre, si l’opposition n’a pas été contredite,
l’opposant pourra, après trois années à compter de l’échéance et de
l’opposition, réclamer le montant desdits coupons de l’établissement débiteur,
sans être tenu de se pourvoir d’autorisation.
Art. 9 - Les payements faits à
l’opposant suivant les règles ci-dessus posées, libèrent l’établissement
débiteur envers tout tiers porteur qui se présenterait ultérieurement.
Le tiers porteur au
préjudice duquel lesdits payements auraient été faits, conserve seulement une
action personnelle contre l’opposant qui aurait formé son opposition sans
cause.
Art. 10 - Si, avant que, la libération
de l’établissement débiteur soit accomplie, il se présente un tiers porteur des
titres frappés d’opposition, ledit établissement doit provisoirement retenir
ces titres contre un récépissé remis au tiers porteur ; il doit de plus
avertir l’opposant, par lettre chargée, de la présentation du titre, en lui
faisant connaître le nom et l’adresse du tiers porteur.
Les effets de l’opposition restent
alors suspendus jusqu’à ce que la justice ait prononcé entre l’opposant et le
tiers porteur.
Art. 11 - (L. du 08/02/02) Sur le vu de l’exploit
mentionné à l’article 2 et de la réquisition y contenue, le syndicat des agents
de change de Paris sera tenu de publier les numéros des titres dont la
dépossession lui est notifiée.
Cette publication, qui aura
pour effet de prévenir la négociation ou la transmission desdits titres, sera
faite le surlendemain, au plus tard, par les soins et sous la responsabilité du
syndicat des agents de change de Paris dans un bulletin quotidien établi et
publié dans les formes et sous les conditions déterminées par un règlement
d’administration publique.
Le même règlement fixera le
coût de la rétribution annuelle due par l’opposant pour frais de publicité.
Cette rétribution annuelle sera payée d’avance à la caisse du syndicat, faute
de quoi la dénonciation de l’opposition ne sera pas reçue, ou la publication ne
sera pas continuée à l’expiration de l’année pour laquelle la rétribution aura
été payée.
Un mois après l’échéance de
la publication non renouvelée, le syndicat fera parvenir à l’établissement
débiteur la liste des titres qui n’auront pas été maintenus au bulletin des
oppositions ; avis lui sera donné, en même temps, que cette notification
lui tient lieu de mainlevée pour tous payements de coupons, remboursement de
capital, conversions, transferts, etc…, et lui donne pleine et entière
décharge, à condition que les numéros signalés comme rayés du bulletin
concordent bien avec ceux inscrits sur les registres de la compagnie comme
frappés d’opposition.
Art. 12 - Toute négociation ou
transmission postérieure au jour où le bulletin est parvenu ou aurait pu
parvenir par la voie de la poste dans le lieu où elle a été faite sera sans
effet vis-à-vis de l’opposant, sauf le recours du tiers porteur contre son
vendeur et contre l’agent de change par l’intermédiaire duquel la négociation
aura eu lieu. Le tiers porteur pourra également, au cas prévu par le précédent
article, contester l’opposition faite irrégulièrement ou sans droit.
Sauf le cas où la mauvaise
foi serait démontrée, les agents de change ne seront responsables des
négociations faites par leur entremise qu’autant que les oppositions leur auront
été signifiées personnellement ou qu’elles auront été publiées dans le bulletin
par les soins du syndicat.
Art. 13 - (L. du 08/02/02) Les agents de change doivent inscrire sur leurs
livres les numéros des titres qu’ils achètent ou qu’ils vendent.
Ils mentionneront sur les
bordereaux d’achats les numéros livrés. Un règlement d’administration publique
déterminera le taux de la rémunération qui sera allouée à l’agent de change
pour cette inscription des numéros.
La négociation qui rend sans
effet toute publication postérieure de l’opposition sera réputée accomplie dès
le moment où aura été opérée sur les livres des agents de change l’inscription
des numéros des titres vendus pour le compte du donneur d’ordre et livrés par
lui.
Si la publication, bien que
postérieure à cette inscription, survient avant la livraison ou l'attribution
au donneur d’ordre, ou à l’agent de
change acheteur, l’opposant pourra, sur la demande de mainlevée formée par
l’agent de change ou par tout autre ayant droit, réclamer les titres contre
remboursement du prix, par application de l’article 2280 du Code civil.
Art. 14 - A l’égard des négociations ou
transmissions de titres antérieures à la publication de l’opposition, il n’est
pas dérogé aux dispositions des articles 2279 et 2280 du Code civil.
Art. 15 - (L. du 08/02/02 (1)) Lorsqu’il se sera écoulé dix ans depuis
l’autorisation obtenue par l’opposant, conformément à l’article 3, et que,
pendant ce laps de temps, l’opposition aura été publiée sans être contredite
dans les termes dudit article, l’opposant pourra exiger de l’établissement
débiteur qu’il lui soit remis un titre semblable et subrogé au premier. Ce
titre devra porter le même numéro que le titre originaire, avec la mention
qu’il est délivré par duplicata.
Le titre délivré en
duplicata conférera les mêmes droits que le titre primitif et sera négociable
dans les mêmes conditions.
Dans le cas du présent
article, le titre primitif sera frappé de déchéance, et le tiers qui le
représentera après la remise du nouveau titre à l’opposant n’aura qu’une action
personnelle contre celui-ci, au cas où l’opposition aurait été faite sans
droit.
L’opposant qui réclamera de
l’établissement un duplicata payera les frais qu’il occasionnera.
Il devra, de plus, payer à
l’avance la publication faite au bulletin, à la rubrique des titres frappés de
déchéance, pour le nombre d ‘années représenté par la feuille des coupons
attachés au titre, sans que cette publication puisse, en aucun cas, être
limitée à une durée inférieure à dix ans.
Un règlement
d’administration publique fixera le coût de la somme à payer au syndicat pour
la publication supplémentaire au-delà de dix ans.
Pour les titres qui ne
portent aucun coupon, l’opposant devra verser au syndicat, à l’avance, le prix
de la publication pendant dix ans à la rubrique des titres frappés de
déchéance.
Art. 16 -
Les dispositions de la
présente loi sont applicables aux titres au porteur émis par les départements,
les communes et les établissements publics, mais elles ne sont pas applicables
aux billets de la Banque de France, ni aux billets de même nature émis par des
établissements légalement autorisés, ni aux rentes et autres titres au porteur
émis par l’Etat, lesquels continueront à être régis par les lois, décrets et
règlements en vigueur. Toutefois, les cautionnements exigés par
l’administration des finances pour la délivrance des duplicata des titres
perdus, volés ou détruits, seront restitués, si dans les vingt ans qui auront
suivi, il n’a été formé aucune demande de la part des tiers porteurs, soit pour
les arrérages, soit pour le capital. Le trésor sera définitivement libéré
envers le porteur des titres primitifs, sauf l’action personnelle de celui-ci
contre la personne qui aura obtenu le duplicata.
Art. 17 - (L. du 08/02/02) Le porteur d’un titre frappé
d’opposition peut poursuivre la mainlevée de cette opposition de la manière
suivante :
v Il fera sommation à
l’opposant d’avoir à introduire, dans le mois, une demande en revendication,
qui sera portée devant le tribunal civil du domicile du porteur actuel du
titre ;
v Cette sommation sera
signifiée au domicile de l’opposant et, si celui-ci n’a pas de domicile connu
en France, au domicile élu dans l’opposition notifiée au syndicat des agents de
change de Paris ;
v Elle indiquera, autant que
possible, l’origine et la cause de la détention du titre, ainsi que la date à
partir de laquelle le porteur est à même d’en justifier ; en cas
d’acquisition par achat, elle indiquera le montant du prix d’achat et
contiendra aussi copie d’un certificat délivré par le syndicat des agents de
change, mentionnant la date à laquelle les titres ont paru pour la première
fois au bulletin, ledit certificat non soumis au droit d’enregistrement ;
v Si la sommation est faite à
la requête d’un agent de change dans les conditions prévues au paragraphe 4 de
l’article 13, elle devra contenir un extrait certifié conforme des livres de
l’agent de change constatant l’inscription des numéros des titres sur ces
livres avant leur publication au bulletin ;
v Cette sommation contiendra,
en outre, assignation de l’opposant à comparaître, dans un délai qui ne pourra
pas être moindre d’un mois, à l’audience des référés, devant le président du
tribunal du domicile du porteur, pour y entendre, dans le cas qui vont être
ci-après spécifiés, prononcer la mainlevée de l’opposition.
Art. 18 - (L. du 08/02/02) Si au jour de l’audience
fixée par l’assignation pour la comparution en référé, l’opposant ne justifie
pas avoir introduit une demande en revendication, le juge des référés devra
prononcer la mainlevée immédiate.
Il en sera de même, quoique l’opposant ait introduit sa demande en
revendication, si le porteur justifie, par un bordereau d’agent de change ou
par d’autres actes probants et non suspects, antérieurs à l’opposition, qu’il
est propriétaire des valeurs revendiquées depuis une date antérieure à celle de
la publication de l’opposition, et si l’opposant n’offre pas le remboursement
du prix d’achat dans les conditions prévues par l’article 2280 du Code Civil.
Le juge des référés pourra
prononcer la mainlevée, même en dehors de toute justification de propriété de
la part du porteur, si l’opposant n’allègue à l’appui de sa demande en
revendication aucun fait, ou ne produit aucune pièce de nature à rendre vraisemblable
le bien-fondé de sa prétention.
Dans tous les cas où la
mainlevée sera prononcée, le juge des référés aura le droit de statuer sur les
dépens.
Sur la signification de l’ordonnance à l’établissement débiteur et au
syndicat accompagnée d’un certificat de non appel, délivré conformément aux
dispositions de l’article 548 du Code la procédure civile, l’établissement
débiteur et le syndicat devront considérer l’opposition comme nulle et non
avenue.
Ils seront quittes et
déchargés, sans pouvoir exiger d’autres pièces ou justifications.
Art. 19 - (L. du 08/02/02) Un décret en forme de
règlement d’administration publique déterminera :
1°
Les formes et les conditions de l’avis à donner en vertu du dernier
paragraphe de l’article 11 ;
2°
Les formes et les conditions dans lesquelles seront tenus les livres
visés par l’article 13, et destinés à l’inscription des titres vendus et livrés
par les donneurs d’ordre, ainsi que le contrôle auquel ils seront soumis.